« L’Un la poupée de l’autre », vidéo de la performance de Nicolas Frespech et Annie Abrahams projetée dans le cadre de la nuitnumérique#5, le 20/10/07, sur le thème don d’ubiquité, webintimité, au centre culturel Saint-Exupéry, esplanade André Malraux, Reims.
Sur l’écran côte à côte les deux images de webcam d’Annie Abrahams et Nicolas Frespech, l’Un la Poupée de l’Autre, à Beaubourg en mai 2007. © DR
< 20'10'07 >
Annie Abrahams et Nicolas Frespech, duo technosensible
Fragile et sensible, un pur instant de trouble aux temps de la technologie. C’était en mai, à Beaubourg, durant le Flash festival, la performance, signée Annie Abrahams et Nicolas Frespech, s’intitule « L’un la poupée de l’autre ». Le titre, déjà, intrigue, séduit tout en effrayant. Qu’ont-ils donc tramé là, ces deux « historiques » du net-art à la française (oui, Annie n’est pas française, elle est née en Hollande mais vit et travaille ici depuis de si nombreuses années qu’elle fait partie de la toute petite famille des nouveaux médias français) ? Un jeu de punching-ball pervers et trash qui jouerait de nos fantasmes de manipulation à distance ? Un face à face d’avatars qui tournerait au grabuge ? Au contraire, le tête à tête n’est pas un face à face, il est mis à distance, comme les communications sur les réseaux (téléphonie, visiophonie, Internet…). Sur la scène obscurcie, deux tentes igloo, éclairées de l’intérieur à la lampe de poche. Au-dessus, deux écrans côte-côte, affichant les images des webcams tenues par les deux artistes dans leur abris de fortune. Chacun isolé, protégé, enfermé (c’est selon…) dans sa bulle, tentant avec maladresse parfois, émotion toujours, de « toucher » l’autre. « -Annie est ce que tu peux me dire quelque chose de rassurant ? Des micros sortent le souffle court de Nicolas, le chuchotement d’Annie. On ne peut que deviner leur présence et percevoir des fragments de leur corps à l’écran. Immatérialité du dispositif, matérialité de l’échange. « L’un la poupée de l’autre » ne dure pas plus d’une demie-heure mais c’est le genre de performance qui s’inscrit durablement dans la mémoire des spectateurs. Montrée ce samedi 20/10 à Reims au cours d’une nuit de l’intime au programme alléchant, la vidéo de la performance traduit (sans tout à fait rendre compte) ce moment de grâce, entre spectacle vivant et happening d’artiste, qui dépasse l’artefact techno du dispositif pour nous ramener à quelques questions très essentielles. Qui sommes-nous ? Comment la technologie modifie-t-elle notre rapport à l’autre, distant physiquement, et pourtant si proche ? Comment dépasser la peur et affirmer notre présence à l’autre, en luttant contre cette distance qui s’établit et s’insinue parfois entre les êtres, extensions technos ou pas ? Que disent de nos peurs ces échanges médiés (via webcam ou écrans de chat) ? Sans aller littéralement dans l’effroi et l’effet trash, les séances de bisous si pudiques en fin de performance sont à des années-lumière des sites porno où des armées d’internautes esseulés, à poil face à leur webcam, sexes pendants et nudité crue désérotisée, renvoient les films porno à un conte merveilleux des 1001 nuits. Même si Nicolas Frespech et Annie Abrahams nous poussent à y penser, cette totale impudeur est ici renversée, l’échange bouche contre bouche (d’écran) prenant une dimension de pure beauté. Rarement performance « techno » a brassé autant d’émotions avec si peu d’effets. Cet instant si singulier, Annie Abrahams et Nicolas Frespech ne sont pas certains de le reproduire. Pas de la même façon, explique Annie, jamais plus « sensationnel », ajoute Nicolas. La beauté de « l’Un la poupée de l’autre » réside aussi dans la rencontre de ces deux artistes qui n’avaient encore rien créé ensemble. L’une, venue au Net pour « s’adresser directement à des personnes dans leur propre intimité, non médiatisé par un contexte de l’art » tournicote depuis toujours autour de ces questions de l’identité, « la découverte de soi à travers l’altérité », et donc du trouble des relations à distance « médiées » par la technologie, de la « vérité » de ce que nous faisons et disons dans les forums et sur les réseaux informatiques. Deux exemples : « I only have my name », une performance online sur l’usurpation d’identité (celle de l’artiste, via canal IRC, l’ancêtre du chat) à l’Academy of fine arts d’Helsinky en 1999, et Peurs/Fears, performance lors d’e-poetry en mai dernier au Cube d’Issy-les-Moulineaux, où Annie reprend les mots d’internautes autour de la « peur ». L’autre, plus farceur et acide (et que poptronics a invité pour un pop’lab), s’intéresse aussi à l’intime, mais dans ce qu’il a parfois de plus obscène (sa première pièce pour le Net, en 1996, s’appelait « la Maison des IP » (pour immondes pourceaux)). Il aime pousser l’autre à dévoiler ses secrets, à jouer du contraste entre le moi-social et le moi-intime, ces deux identités que les technologies contribuent à mieux mélanger voire emmêler. L’alliance de leurs regards produit ce bref instant intense, vif et acide, tendre et fragile. Sensible, on vous dit.
< 4 >
commentaires
écrit le < 06'11'07 > par <
n 9Lr frespech.com
>
La vidéo sera prochainement montrée à la galerie ESCA à Milhaud dans le cadre de l’exposition d’Annie Abrahams "Tout va bien" http://bram.org/info/toutvabien/indexfr.htm
écrit le < 21'11'07 > par <
mister.n LqR laposte.net
>
La vidéo sera présentée le 8 décembre dans le cadre du festival Intimacy accros visceral & digital performance. Goldsmiths university. London http://www.goldsmiths.ac.uk/intimacy/show-tell.php
écrit le < 18'01'08 > par <
mister.n a6c laposte.net
>
Téléchargement version privée et DIVX gratuit jusqu’au mois de février à cette adresse en P2P http://www.vuze.com/details/UHTFW5JAZBTAOAJP5HBPXHCW4EAMXDYU.html ou http://lenougat.free.fr
écrit le < 26'01'08 > par <
nicolas 9LY frespech.com
>
Mise à jour du torrent : http://www.vuze.com/details/BMVJLODKWLSUBRFVX4FTKB2TB7BIDSVO.html
Métavers, tout doit disparaître (et Hubs aussi)
« Fluidités : l’humain qui vient » expose les confins du vivant au Fresnoy Pourquoi l’Oculus Rift se fout des mondes virtuels d’aujourd’hui L’art d’éditer l’esprit libre avec do.doc Alt-porn, le X en version Y |