Après leur version musclée de Daydream Nation à la Route du Rock il y a quinze jours, Sonic Youth ouvre ce soir le festival Jazz à la Villette. Le rapport entre leur rock rageur et un festival dédié au jazz contemporain (dont poptronics reparlera fissa, à l’occasion du concert exceptionnel de Tom Jenkinson aka Squarepusher, le 7 septembre) ? Dans la préhistoire du groupe, au début des années 80, les jeunes Thurston Moore, Lee Ranaldo, Kim Gordon et Steve Shelley prenaient en pleine tête les performances et autres symphonies pour guitare électrique de Glenn Branca, au carrefour de la musique électro-acoustique et du jazz le plus extrême.

Ces nuits passées à explorer les possibilités de leurs instruments, dont on retrouve l’écho dans l’œuvre de Christian Marclay, ont durablement marqué le groupe, notamment dans ses albums les plus radicaux et secs, « Evol », « Bad Moon Rising », « Confusion Is Sex » et bien entendu « Daydream Nation », pierre philosophale du rock moderne. Afin de juguler sa schizophrénie entre compositions rock et musique expérimentale, et publier cette dernière, le groupe a créé en 1996 son propre label, SYR (comme Sonic Youth Recordings), dont les fans s’arrachent les copies numérotées et soigneusement packagées.

Le concert de ce soir est donc à envisager sous cet angle-là, même si le groupe prend toujours un malin plaisir au contre-pied. Il se produira dans une formule inédite, accompagné du suédois Mats Gustafsson, auteur de sophistications à la Mingus, du guitariste tripatouilleur Jean-Marc Montera et enfin du saxophoniste soprano Michel Doneda.

benoît hické