Une vidéo pour un appel à dons de la fondation Wikimédia : un changement stratégique sur la forme pour lutter contre les critiques grandissantes contre Wikipédia, l’encyclopédie en ligne.
Jimmy Wales, homme d’affaires américain, cofondateur avec Larry Sanger, de Wikipédia. © DR
< 08'11'07 >
Un Wikithon pour sauver Wikipédia ?
Après le silence, une réaction. Face à la montée en puissance des critiques adressées à Wikipédia sur la façon dont les 8 millions d’articles en plus de 200 langues y sont écrits collaborativement et ouvertement, face aussi aux difficultés financières, Wikimédia change de méthode de communication : la fondation américaine, qui gère notamment l’encyclopédie en ligne, vient de lancer sa première campagne vidéo d’appel à dons. « Wikipédia a déjà changé le monde », y affirme d’un ton patelin le président de la fondation, Jimmy Wales. Née en 2001, cette utopie de savoir universel coopératif que chacun peut enrichir, n’est pas une entreprise et s’appuie sur les dons privés, faisant appel chaque année aux généreux donateurs pour entretenir les serveurs et infrastructures nécessaires à son expansion. A l’heure où sont écrites ces lignes, plus de 17 750 internautes ont déjà répondu à l’appel pour « l’accès libre à tous les savoirs de l’humanité ». Ce changement stratégique, qui vient s’ajouter à la préparation du premier wiki-reportage sur la méthode Wikipédia (dont on peut déjà voir la bande-annonce ici) pour le printemps 2008, répond aux attaques de plus en plus virulentes sur le modèle et les abus (de position dominante) que pose Wikipédia. Ainsi, « le Monde » éditorialisait le 3 novembre sur un jugement du tribunal de grande instance de Paris qui a débouté fin octobre des plaignants attaquant Wikipédia au motif que leur homosexualité y avait été révélée. Le tribunal a jugé que la fondation américaine n’était qu’hébergeur technique des contenus de Wikipédia (que l’organisation avait depuis longtemps retirés de ses pages). En noircissant le tableau, l’éditorial estime que « si rien n’est fait, c’est une sorte de Big Brother mondial à l’envers qui va se mettre en place. Nul ne sera à l’abri de la divulgation, à la vitesse de l’électronique et sans possibilité de réagir, d’épisodes réels ou inventés de sa vie privée, avec ou sans intention de nuire ». L’affaire est plutôt complexe et certains blogs spécialisés y reviennent abondamment. Ce n’est ni la première ni la dernière fois que Wikipédia est attaquée sur sa fiabilité et sa responsabilité éditoriale. Certes, l’accès au savoir universel que revendiquent les adeptes de Wikipédia est louable et les exemples de démocratisation dans les pays en développement absolument évidents. N’empêche, la complexité du système contribue à transformer l’utopie en débat caricatural des « pro » et « anti », prompts à dénoncer les approximations et les erreurs des millions de contributeurs, les processus de validation « wikipédiennes » parfois lapidaires (on se souvient de l’exclusion au printemps de deux internautes ayant tenté de faire intrusion dans les articles en français avec des citations de Roland Barthes, au motif que ces personnes utilisaient la même adresse internet). Deux chercheurs américains des laboratoires HP, Dennis M. Wilkinson et Bernardo A. Huberman, ont analysé en profondeur l’encyclopédie (version anglaise) et ses 6,4 millions d’articles (modifiés par quelque 5,77 millions d’individus !) pour en valider la pertinence : ils concluent à la « corrélation cruciale entre la qualité des articles et le nombre de modifications effectuées sur ces articles », corrélation qui selon eux valide Wikipédia « en tant qu’effort collaboratif couronné de succès » (voir à ce sujet l’excellent billet d’Olivier Ertzscheid, enseignant en sciences de l’information à l’université de Nantes, sur son blog Affordance.info). Les médias n’ont pas contribué à éclairer le débat : un colloque, organisé par Wikimédia France fin octobre à Paris, n’a fait l’objet d’aucune couverture. Le but y était pourtant clairement affiché : « Wikipédia n’est plus un projet un peu loufoque et utopique. Sa consultation est rentrée dans les habitudes de très nombreux internautes. Plus encore, elle est citée comme exemple de ce que pourraient être demain les communautés virtuelles. Ce colloque est né de l’envie d’améliorer la qualité de l’encyclopédie et sa fiabilité en abordant de front les nombreux obstacles qui se posent pour y arriver ». Une piste, à l’initiative d’internautes américains, pourrait contribuer à apaiser les polémiques : la déclaration des droits des usagers des réseaux sociaux, qui commence tout juste à être relayée en France, et sur Facebook, grâce à l’artiste Olivier Auber. Comme les spams ont été combattus, comme les blogs se sont peu à peu disciplinés en matière de diffamation par exemple, ladite déclaration table sur un principe évident et pourtant très peu appliqué par les réseaux sociaux : la liberté pour l’internaute de décider de conserver ou partager ses données privées. Wikimédia booste sa communication - Extrait de la vidéo d’appel aux dons :
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