Parcours guidé de la Nuit blanche à Paris, le long de la ligne 14.
Ignazio Mottola, architecte, designer et artiste d’origine italienne a conçu le projet architectural de « Second Night ». © Second Night
< 06'10'07 >
Une ligne pour une Nuit blanche
Images sonores et tableaux lumineux, la Nuit blanche 2007 dépensera son pesant de kilowatts. Sélection ultra subjective en quelques points d’arrêt sur le parcours de la ligne 14. Arrêt Gare St-Lazare. Onedotzero réinvente la volupté numérique. Il est logique de retrouver une programmation siglée onedotzero au sein d’une Nuit Blanche décloisonnée et bicéphale, Jérôme Delormas, co-directeur artistique de la manifestation, ayant la casquette multimédia bien vissée sur la tête. Les Londoniens de Onedotzero (« 1.0 », symbole de l’encodage numérique), aujourd’hui recentrés sur la production de films et d’installations, ont été pionniers dans le champ du motion graphic design, du Vjing, du clip et plus généralement des installations multimédias d’un genre nouveau. Cette Nuit Blanche constitue ainsi une occasion de visionner les programmes de la dernière édition du festival 2006 (agrémentés de quelques inédits plus récents). Au programme, la présentation de l’excellent DVD 05, dont poptronics a déjà parlé, et de Wow+Flutter 07, best of de l’animation numérique : on retrouve Leftchannel, Grant Orchard, Simon Robson, Impactist mais aussi le prolifique Richard Fenwick, soit un mélange idéal de films expérimentaux souvent musicaux et d’animations ultra contemporaines. La section Wavelenght 07 est quant à elle tournée vers les clips (Beck, The Horrors, Cornelius, Justice). Outre ces projections, trois collectifs se relaieront pour des performances audiovisuelles inédites. Ne surtout pas zapper « The Wourali Malady » de Flat-E, graphistes connus notamment pour leurs collaborations avec l’écurie Warp Records (voir les visuels du retour scénique d’AFX, à Turin). DFuse, eux, font davantage dans le Vjing archi/motion graphic tendance Designer Republic (ils ont notamment collaboré avec Beck pour le DVD associé à son album « Guerro »). Terrain Cardinet, Mur petite halle, 147, rue Cardinet, 17e. Arrêt Madeleine. Pierre Giner en pleine I-Dance. Les danseurs virtuels kawaï et top branchouilles de Pierre Giner à la galerie Royale (installation à laquelle participe poptronics) sauront-ils entraîner les Parisiens sur le dance floor ? L’idée de la fête (pas foraine, pas arty), juste la fête, avec ses images de boules à facette et de filles et garçons apprêtés, lookés, sur un air de DJ, marque déjà une conception de l’art contemporain décomplexée, décoincée, populaire sans glisser jusqu’à la démagogie. On aime. Fondation d’entreprise Ricard, entrée 9, rue Royale, 8e. Arrêt Pyramides, les artistes visuels dont on parle, UVA. Première en France des artistes visuels qui montent qui montent, United Visual Artists (UVA), dont poptronics vous a déjà parlé. Le collectif britannique investit à cette occasion la Place du Palais Royal, en face du Conseil d’Etat, avec « Triptych », installation interactive assez flippante. Elle mettra le public face à trois présences indistinctes qui réagiront, grâce à un système de capteurs très savant, au moindre mouvement. Le corps servira donc d’interface, générant un dialogue avec la lumière, le son et l’espace. Place du Palais-Royal, 1er. Arrêt Châtelet. H5 à la bibliothèque Forney, effet de leurre. Sans doute pas la plus spectaculaire des propositions pour cette Nuit Blanche, le « Renaissance » du collectif français H5 (graphistes, designers…) pourrait presque passer inaperçue pour le badaud qui ne connaît pas la bibliothèque Fornay. Des bâches qui la recouvrent, un faux projet immobilier de bureaux, tout y a été conçu pour dupliquer le réel (et mettre à nu la réalité des opérations immobilières sans goût ni couleur), manière de faire réagir. A voir si les Parisiens goûteront la farce. Bibliothèque Forney, 1, rue du Figuier, 4e. Arrêt Chatelet. Second Night, téléportation à l’écran. Le projet de dernière minute de la Nuit blanche est l’effet d’une envie apparemment ancrée chez le maire et son adjoint à la Culture de voir Paris enfin investir le monde persistant en ligne Second Life. Rappelons à ceux qui auraient zappé une année de buzz et de délires médiatiques autour de cet univers qui réunit quotidiennement des dizaines de milliers d’internautes (sous la forme d’avatars) : Second Life déclenche aussi d’incroyables désirs chez les non-connectés. Rumeurs de fortunes virtuelles, récits de voyages au bout du cybermonde, opérations communication des entreprises, les fantasmes vont bon train. Et les édiles se placent en créant dans Second Life un double de leur cité. Ce ne sera pas le cas pour Second Night, faute de temps. Bertrand Delanoë s’est même déplacé lors de la conférence de presse tardive pour présenter l’opération. Christophe Bruno, le net-artiste poil à gratter (il n’aime ni Google, ni les marques…) s’est emparé du projet et invite un tas d’artistes que poptronics aime (Agnès de Cayeux, David Guez, Claude Closky, Alain Della Negra et Kaori Kinoshita) et même Miltos Manetas. On doute encore un peu de l’espace d’exposition (pourquoi reproduire dans une architecture virtuelle le réel ?) mais on se réjouit d’avance du « Second France » de David Guez et Christophe Bruno ou de la quête d’Agnès de Cayeux (« Je cherche Lily Drake »), suite logique à son pop’lab ici-même. Un blog a été créé pour l’occasion et pour la première fois sans doute dans l’histoire de la manifestation, on pourra vivre sa Nuit blanche en chambre… Hôtel d’Albret, 4e. Arrêt Gare de Lyon. Le grand nom de l’art contemporain, James Turrell. S’il n’en fallait qu’un… Seul « grand artiste » à figurer dans la sélection Nuit blanche 2007, James Turrell joue toujours avec subtilité autour de la lumière dans ses installations souvent monumentales, comme ici ses grands tableaux lumineux apposés sur la façade de la Caisse des Dépots. Des pièces qui immergent le spectateur dans un spectacle mental et philosophique. L’artiste américain se définit comme « quelqu’un qui utilise la lumière comme matériau afin de travailler le médium de la perception ». Pour Nuit blanche, l’artiste américain crée « Nightlife », une installation in situ constituée de dix-sept « tableaux » lumineux projetés sur la façade de 140 m2. Forcément sublime. Caisse des Dépôts, 53-55, quai d’Austerlitz, 13e. Arrêt Olympiades. François Chalet, fenêtre sur tour. François Chalet est un graphiste plutôt actif. Suisse de son état, il a réussi à se forger une identité forte et originale dans l’univers impitoyable du graphisme, en puisant dans une certaine épure asiatique mais aussi dans l’univers des comics américains, des dessins animés à la Tex Avery et donc du slapstick. Le tout est cocassement décliné sous forme d’animations en flash et 3D, très colorées et délirantes. Il y est souvent question de courses poursuites et de chutes dans le ravin. Depuis quelques années, il s’acoquine avec des chorégraphes et des musiciens afin de prolonger en live son travail (on attend d’ailleurs de pied ferme le fruit de sa collaboration avec le musicien electro Beat Soler, censé sortir en DVD sous l’intitulé « Chatville »), mais c’est sous l’étiquette de VJ, forcément très graphique, qu’il se produira à quelques encablures des Olympiades, puisqu’il balancera ses animations sur les murs de la tour Tolbiac (horaires non précisés), sur la musique toute douce de Mathias Vetter. Enfants bienvenus, évidemment, même si les créatures de Chalet ne sont pas exemptes de cruauté… Tour Tolbiac, 13e.
L’icône Susan Kare
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