Vic Chesnutt est mort le jour de Noël à Athens, Georgie. Hommage au chanteur écorché folk.
Vic Chesnutt (1964-2009). © Constellation
< 28'12'09 >
Vic Chesnutt, that’s all folk
Cette fois, il ne s’est pas raté. Vic Chesnutt est mort le jour de Noël à Athens, Georgie, suicide par surdose de « relaxants musculaires ». Sa maison de disques a confirmé, après quelques heures indécises. A 45 ans, le chanteur américain écorché a mis un terme à une vie qui avait tout d’un chemin de croix, d’une « destinopathie » comme disent les psys. Enfant adopté, victime d’un grave accident de voiture à 19 ans (l’ivresse, déjà), qui lui fera perdre l’usage de ses jambes, Chesnutt était une des grandes voix intranquilles de l’Amérique. Il chantait l’alcool solitaire, la déglingue pour se sentir exister, le monde tel qu’il va mal. Avec mélancolie bien sûr, mais surtout un humour et une ironie féroces, qui faisaient de lui un songwriter si singulier. Dans son fauteuil, recroquevillé sur sa guitare, malgré des problèmes articulaires, il faisait bien vite oublier sa condition pour laisser parler les mots et les mélodies, drôle, habité, cinglant. Vic Chesnutt - « Cobbham Blues » (Athens, Georgie, 2007) : Malade et endetté jusqu’au cou (il devait 70.000 dollars à son hôpital), connu pour ses phases sévères d’autodestruction, ce troubadour trash et mélancolique s’est donné la mort alors même que la réforme du système de santé américain était enfin votée. Déjà, ses amis (Michael Stipe, Kristin Hersh, qui a la première annoncé la nouvelle sur son Twitter, Patti Smith, Jem Cohen…) ont lancé une souscription pour soutenir sa femme, Tina, en apurant cette dette dont il parlait à longueur d’interview ces derniers mois. Et sont tous terrassés par cette disparition qui n’a rien d’une surprise (Chesnutt confessait trois-quatre tentatives sérieuses). Vic Chesnutt - « Supernatural » (session acoustique pour Le Cargo, 2008) : Repéré par Michael Stipe de REM à la fin des années 80 (« Nous avons perdu l’un de nos très grands », salue-t-il aujourd’hui), Vic Chesnutt connaît le succès via le circuit indé au milieu des années 90 (« Drunk », 1993, « Is This Actor Happy », 1995) et fait découvrir à toute une génération un folk frondeur et impudique, vrillé d’électricité et traversé de fulgurances poétiques. A mi-chemin entre l’autobiographie la plus brute et le conte urbain déglingué, il envoie balader le classicisme du genre (comme le fait Will Oldham au même moment avec la country), ouvrant larges les perspectives de ce que peut être la « chanson américaine ». A ce titre, il est sans conteste l’un de ceux qui ont rendu possible l’émergence du mouvement freak-folk quelques années plus tard. Vic Chesnutt - « Warm » (live avec A Silver Mount Zion à Munich, 2007) : Après un difficile début de millénaire, Vic Chesnutt entamait tout juste une deuxième vie artistique au sein de l’écurie canadienne expérimentalo-anarchiste Constellation (Godspeed You ! Black Emperor, Do Make Say Think...). Après un impressionnant « North Star Deserter » en 2007, l’un des grands disques de la décennie passée, A Silver Mt Zion et Guy Picciotto (Fugazi) venaient d’accoucher avec lui d’un magnifique « At The Cut » cet automne, nouvelle rencontre électrique du post-rock choral des Canadiens avec ce petit homme chétif viscéralement accroché à sa guitare, compagne de toutes ses errances. On y trouve ce « Flirted With You All My Life », où il assure qu’il faut écouter la vie et résister à la tentation de se supprimer : « I found out with time that really / I was not ready, no no, cold death / Oh death, I’m really not ready. » Malheureusement, vendredi soir, il était prêt. Vic Chesnutt - « Flirted With You All My Life » (Cleveland, Ohio, juin 2009 :
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