« Travelling Without Moving », Oboro, 4001 rue Berri, Montréal (Québec), du mardi au samedi, de 12h à 17h, jusqu’au 8/12, entrée libre.
Le « Nocinema » de Jérôme Joy, du cinéma en temps réel. © Aude Crispel
< 27'11'07 >
Voyageons immobiles à Montréal
Montréal, envoyée spéciale Cheminer autour du voyage et de la distance, c’est l’invitation faite au visiteur d’Oboro, centre d’art montréalais à l’avant-garde des nouveaux médias. Sa dernière exposition, « Travelling Without Moving », s’inspire d’un thème cher à Paul Virilio : « Avec les télécommunications, il n’y a plus d’arrivée, il n’y a plus de départ, il n’y a plus de voyage… tout arrive. » Sur le très chic plateau Mont-Royal à Montréal, la commissaire berlinoise Susanne Jaschko (familière de la Transmediale, qu’elle a dirigée de 2000 à 2004) a réuni six œuvres d’art minimalistes qui utilisent toute une panoplie de technologies sans que rien ne tombe en panne, un petit miracle à mettre au crédit de ce centre pionnier créé en 1982, l’un des rares au monde à posséder sa collection de net-art. Le compositeur français Jérôme Joy, dont poptronics a déjà dit le plus grand bien (il naviguait récemment à l’« Urban Screens » de Manchester et aux « Rencontres de l’atelier de création sonore Radiophonic » à Bruxelles), est ici chez lui, investissant une salle dédiée à son « Nocinema ». Un film à base de webcams sans queue ni tête, sans stars ni scénario, parcouru par des moments de vide qui défilent sous nos yeux. Son système construit autour d’images tirées de webcams connectées autour du globe, joue l’écran total et le cadrage tantôt panoramisé, tantôt « temporisé » par le montage généré en ligne. Une sorte de cinéma en temps réel, où les sons viennent coller aux images à partir d’une base de données régulièrement enrichie par une bande de designers sonores ou d’artistes de la gratouille sonique (Magali Babin, DinahBird, Christophe Charles, Yannick Dauby, Chantal Dumas, Emmanuelle Gibello, Jérôme Joy, Luc Kerléo, Alain Michon et Jocelyn Robert). Chaotiques, les pixels grossis par la taille gigantesque de la projection s’accordent avec le caractère désordonné de la bande son. Deux écrans latéraux clôturent l’installation sobre de cette petite salle devenue boîte noire. Assis sur des chaises sommaires, on perd toute notion d’espace, noyé dans une temporalité irréelle… Le dépaysement passe aussi par la découverte de l’autre. Sascha Pohflepp et Jakob Schillinger, deux artistes allemands, présentent « Fixr », contre-pied au site Flickr, la base de données d’images d’internautes du monde entier. Leurs auteurs inversent la proposition en présentant leur offre (gratuite) comme un service de mémoire visuelle photographique, chaque internaute pouvant commander la photographie originale qui correspond à un de ses souvenirs. Une version anglophone de l’Echoppe Photographique de Nicolas Frespech et Bénédicte Albrecht, mise en ligne en 2004. Ici scénographié, l’ordinateur connecté à « Firx » est placé dans l’angle de deux murs recouverts de polaroïds noirs sur lesquels on peut lire les phrases décrivant la photographie recherchée par les internautes pour un voyage dans la mémoire des autres. Plus loin, une invitation à entrer pour écouter rien moins que les sons de l’univers : c’est « Radio Astronomy » du collectif Radioqualia. Bien enfermé dans le noir, le visiteur entendra Jupiter, Mars ou une radiation solaire captée par les télescopes du collectif ; expérience cosmique assurée ! Des étoiles, on revient aux traces du voyage, théoriques ou réelles, avec l’« Universal Digest Machine » du Norvégien Marius Watz, primée à l’Ars Electronica en 2005. Simple machine posée sur son présentoir, elle ressemble à une petite imprimante ayant perdu son carénage. Depuis le début de l’exposition, elle travaille nuit et jour, inlassablement, voyageant au cœur du World Wide Web, visitant et analysant toutes les pages qu’elle parcourt. Pour preuve de son activité effrénée, elle crache toutes les cinq secondes un récapitulatif de la page Web explorée : URL, date, heure, nombre de liens sur la page, nombre d’images, caractères, mots… Toutes ces feuilles, comme une métaphore nouvelle de l’incontournable carnet de voyages, ont vocation à recouvrir le sol des galeries qui accueillent la machine à digestion universelle, témoignant d’un périple pas si virtuel que ça.
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