Retour sur la scène antifolk à l’occasion du concert de Coming Soon le 11/04 à la Flèche d’Or, 102 bis rue de Bagnolet, Paris 20e. Et le 12/04 à Limoges, le 9/05 à Dijon...
Album : « New Grids » (Kitchen/Pias).
Coming Soon, venu d’Annecy, rafraîchit l’antifolk. Le 11/04 à la Flèche d’Or. © DR
< 11'04'08 >
Ce retour de l’antifolk, c’est pour bientôt ?

Régulièrement, l’antifolk refait surface, antidote à la virtuosité qui fait les modes (revival new wave, folk psyché, nu-rave, italo-disco ces temps-ci), parce que partisan d’un son brut quitte à être imparfait : ce qui est au cœur ici, c’est le plaisir et l’émotion de jouer. Premier album du jeune groupe Coming Soon, tout droit débarqué d’Annecy, « New Grids » est l’un des disques attachants de la saison, qui retrouve le goût de ce folk en liberté.

Le truc de ces cinq garçons et deux filles (Howard Hughes, Billy Jet Pilot, Leo Bear Creek, Carolina Van Pelt...) : raconter des petites histoires une guitare à la main en se laissant aller au plaisir d’être ensemble dans un cocon folk tout frais, où l’on ne se regarde pas le nombril. On parle de « Jack Nicholson Style », de « Private Tortures », de « Time Bomb », sans autre ambition que de faire de jolies chansons à fredonner, comme on s’en rendra compte ce soir à la Flèche d’Or. Et comme souvent pour les bons groupes français, la reconnaissance vient d’ailleurs. Sous le nom d’Antsy Pants, Coming Soon a composé deux morceaux pour la bande originale de « Juno » de Jason Reitman, la comédie US qui a beaucoup fait parler d’elle. Ils s’y retrouvent aux côtés de Cat Power, Belle & Sebastian et Sonic Youth, mais c’est bien leur « Vampire » qui fait actuellement un carton. Assez classe pour ces montagnards dont le plus jeune a tout juste quatorze ans, le patriarche de la bande plafonnant à vingt-cinq…

Coming Soon - « Big Boy » :



Cette manière libre d’envisager le folk rappelle inévitablement Herman Düne ou les Moldy Peaches, fleurons des scènes open mic des années 90-00. Retour en images sur la phalange antifolk.

Mouvement souterrain nommé ainsi par antiphrase car nourri du punk (le naturel et l’abrasif comme totems), fidèle à une esthétique DIY, engagé mais capable d’une autodérision rare chez les tenants du folk politisé, l’antifolk a affleuré à New York au mitan des années 80, dans des bars comme le Speakeasy ou le Fort (et plus tard le mythique Sidewalk Café). S’y déroulaient, à l’initiative d’une poignée de songwriters très influencés par les punks, comme Lach dont on fait souvent la tête pensante de la première scène antifolk, sans qu’il ne connaisse jamais le moindre succès (il vient de sortir un disque dans l’indifférence générale), à l’instar des autres pionniers (Billy Nova, Michael America…), des soirées où qui le souhaitait empoignait une guitare, qu’il chante et joue juste ou non, pourvu que sincérité, humour et envie soient au rendez-vous.

Leurs suivants seront mieux servis : Ani DiFranco, The Washington Squares ou Michelle Shocked gagneront un public plus large. Mais au tournant de la décennie, malgré le succès surprise d’un Beck, l’antifolk, balayé par la vague grunge et l’indie rock lo-fi, retourne à une certaine confidentialité. On aurait bien exhumé l’essentielle Brenda Kahn et ses morceaux de bravoure féministes et explicites ( « Madagascar », « My Lover » ou « I don’t think, I drink coffee instead » sur « Epiphany in Brooklyn », son album de 1992), mais les sites de vidéos en ligne n’en ont pas gardé trace. Va donc pour cet aperçu de la scène 80.

Extrait d’un documentaire sur la première génération antifolk :



A la fin des années 90, New York s’agite à nouveau. Avant le retour de hype rock à Brooklyn, la ville se passionne pour The Moldy Peaches et leurs concerts allumés (ils se déguisent en lapins…). Le DIY est de retour et des figures underground comme le fou chantant Daniel Johnston réapparaissent, portées par une flopée de jeunes songwriters. The Moldy Peaches explosent presque aussi vite qu’ils sont arrivés, Adam Green et Kimya Dawson continuant leur route en solo. Mais le renouveau est amorcé, avec entre autres le puriste Jeffrey Lewis (qui reprenait récemment les incunables anarcho-punk de Crass Records) ou la pianiste russo-américaine Regina Spektor.

Un extrait du docu « Antifolk Cutz », sur cette seconde génération :



Cette fois, l’antifolk déborde largement New York et les Etats-Unis, et fait tache d’huile partout. En France aussi, où son représentant émérite Herman Düne ouvre des soirées open mic au Pop’in parisien dans les années 2000, comme en Angleterre (cf la compil « Up the Anti » l’an dernier). Depuis quelques années, le mouvement s’était à nouveau fait griller la politesse par les singes savants du hippie folk en revisite méticuleuse de l’héritage sixties. Le voilà qui retrouve le devant de la scène. On ne va pas s’en plaindre…

matthieu recarte 

votre email :

email du destinataire :

message :