Retour sur l’annulation des soirées du festival Seconde Nature, les 5 et 6/06 à Aix-en-Provence.
La Fondation Vasarely en périphérie d’Aix, était le lieu de repli du festival Seconde Nature, avant que les tsiganes n’investissent les pelouses, et obligent de facto les organisateurs à annuler les soirées. © DR
< 06'06'09 >
Seconde Nature annulé après un festival de galères

Pas de fiesta sous les étoiles ce week-end à Aix-en-Provence : la partie concerts du festival Seconde Nature a été annulée à la dernière minute après un rocambolesque enchaînement de galères, sur fond de manœuvres politiques. On attendait beaucoup de cette troisième édition : un plateau électro aux petits oignons (Ivan Smagghe, Andrew Weatherall, Chloé, Moderat, Danton Eeprom, Tim Exile, Metronomy…), des outsiders bien choisis (The Chap) et une belle exposition d’arts numériques (Granular Synthesis, Du Zhenjun, Vincent Elka…). Seule cette dernière, intitulée « Dessine-moi un mutant », est maintenue, à la Scène numérique et à la Fondation Vasarely (on y revient en début de semaine). Un immense gâchis plutôt symptomatique des difficultés pour la culture dans le Sud.

Déménagement en catastrophe
Né de la fusion de deux manifestations locales, Arborescence (culture numérique) et Territoires Electroniques (la suite musicale de Warp@Vasarely organisée par le collectif Biomix en 2003), Seconde Nature est de ces événements hybrides et contemporains que Poptronics suit de près (nous sommes partenaires depuis deux ans). Après une première édition à la Fondation Vasarely, le festival s’était installé l’an dernier à la Cité du Livre, une ancienne fabrique d’allumettes en plein centre-ville. C’était sans compter avec les riverains qui, à coups de courriers dénonçant trafic de drogues et prostitution et de pétition incendiaires, ont fait reculer la mairie. Et obtenu le déménagement du festival à trois semaines à peine de l’événement.

Il faut dire que le Conseil d’Etat doit se prononcer ce début juin sur la validité de l’élection municipale. Dès lors, pas question pour l’équipe en place de se mettre à dos riverains et commerçants du centre ville alors qu’ils pourraient être appelés aux urnes dans les mois qui viennent. Seconde Nature a donc pris la direction de la Fondation Vasarely, en périphérie. « L’intérêt de la Cité du livre, c’est que c’est un lieu fermé, qu’on pouvait occuper jusqu’à six heures du matin, rapporte Pierre-Emmanuel Reviron, le directeur de Seconde Nature. La mairie a cédé face au barouf du comité de quartier. Elle nous donnait jusqu’à 2 heures du matin, ce qui signifiait supprimer la moitié de l’affiche. Nous avons préféré opter pour un changement de lieu. Nous sommes donc retournés à Vasarely. On a revu les horaires pour terminer à 4 heures mais obtenu d’installer les festivaliers en plein air, malgré les nuisances sonores. »

Occupation pentecôtiste
Evidemment, ce déménagement de dernière minute demande un énorme boulot à la petite équipe organisatrice. Il faut reconfigurer le festival en quelques jours (on est déjà le 15 mai), refaire la communication, alerter le réseau, etc. Mais comme un malheur n’arrive jamais seul, le 25 mai, une centaine de caravanes de La Vie en voyage, un groupe de tsiganes pentecôtistes, débarque sur les pelouses de la Fondation. Et s’installent, comme ils le font depuis quelques années ans déjà à la fin du printemps. « Ils sont rodés : quand ils arrivent sur un lieu, ils savent qu’ils peuvent y rester une quinzaine de jours avant d’être ennuyés, explique le directeur de Seconde Nature. Leur argument est valable d’ailleurs : il n’y a pas selon eux d’aire d’accueil digne de ce nom pour des groupes de leur importance dans la communauté d’agglomération. »

La Ville et la Fondation portent plainte mais, jours fériés aidant, l’audience en référé ne se tient que le mardi 2 juin, soit trois petits jours avant le début programmé du festival. Le jugement tombe le lendemain : les caravanes doivent quitter les lieux vendredi matin. Dès mercredi, une trentaine de personnes commence à travailler au montage de la scène. Au milieu des caravanes. A 16 heures, les organisateurs font constater par huissier l’impossibilité d’organiser les concerts. Seconde Nature transforme le vernissage de l’exposition, jeudi soir, en conférence de presse pour expliquer cette annulation. « Les élus de la ville et de la région, de tous bords politiques, les acteurs culturels, tous nous ont renouvelé leur soutien, raconte Pierre Emmanuel Reviron. On a reçu des centaines de mails de soutien de toute la France et de l’étranger. On a un sentiment global de gâchis. C’est plus qu’un coup dur, c’est un électrochoc. »

Culture en berne
Le festival est annulé et les caravanes sont toujours là. Elles partiront dimanche vers un nouveau lieu. A la mairie, on se repasse la patate chaude : la fille de la maire, en charge des musiques amplifiées, préfère que le journaliste s’adresse à l’adjoint à la culture, lequel est indisponible jusqu’à lundi. Manque d’implication ? Pas pour Pierre Emmanuel Reviron, qui rappelle que le « projet est vraiment soutenu par la mairie, l’association est subventionnée, notre lieu, la Scène numérique, est un lieu municipal ». Alors, que faire pour éviter de revivre une telle situation ? « Nous sommes confiants sur l’avenir, même si la discussion avec les assurances ne va pas être forcément facile. Le budget du festival, hors salaires, c’est 250 000 euros… ». Malgré cet optimisme forcé, l’annulation de Seconde Nature est un signe de plus des difficultés récurrentes que rencontrent les organisateurs d’événements culturels dans le Sud-Est de la France.

A Marseille, les difficultés récurrentes de Marsatac à trouver un lieu, ou encore la récente bronca de la CGT portuaire qui vient de contraindre le Festival de Marseille, qui a lieu dans une dizaine de jours, à se trouver un autre point de chute, démontrent que la culture est très loin d’être une priorité pour les politiques locaux. De droite comme de gauche. Et ce, malgré la désignation de la ville comme capitale européenne de la culture 2013. Les porteurs du projet Marseille-Provence 2013 sont d’ailleurs venus, inquiets, s’enquérir des détails de l’affaire Seconde Nature.

matthieu recarte 

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< 2 > commentaires
écrit le < 06'06'09 > par < info voL laplaceforte.org >

ok de l’intérieur et depuis trois mois que je travaille sur la version de l’install j’ai vu des choses plutôt alarmantes et en même temps tellement attendues sitôt que l’on base ou diffusion ou production sur des fonds publics. mais bon ce n’est ma place d’en parler (manque de recul) ceci dit ça m’empêche pas d’y penser. sacré gachis. ça va me prendre un peu de temps pour digérer la manoeuvre et au final l’instrumentalisation volontaire (les élus) ou involontaire (les organisateurs) de mon travail. last time.

vincent elka. // le temps de la guerre.

écrit le < 08'06'09 > par < info Ea3 poptronics.fr >
Suite : l’élection municipale invalidée, les Aixois retourneront aux urnes... Lire les précisions ici.