Sortie de « Hell is Invisible… Heaven is Her/e » (Sweet Nothing/Differ-Ant), premier album studio de PTV depuis onze ans
Un des secrets les mieux gardés de l’underground : Genesis P-Orridge. © DR
< 30'05'07 >
Vous reprendrez bien un peu de P-Orridge ?
« Vers la fin des années 40, on a découvert que l’atome était fissible. Tout a changé pour toujours lorsque nous avons découvert que le monde pouvait être découpé, segmenté, et que le son également. Nous avons découvert que tout ce qui a rapport avec la culture peut être découpé et ré-assemblé d’une autre façon, pour créer des choses qui n’existaient pas auparavant. » (1) Cette profession de foi est signée d’un des artistes les plus influents de ces trente dernières années, l’un des secrets les mieux gardés de l’underground : Genesis P-Orridge. Ex-leader de Throbbing Gristle, groupe pionnier de la musique dite « industrielle » (2) et préfigurateur de la techno, cet(te) Anglais(e) transgenre de 57 ans sévit depuis plus de vingt-cinq ans aux frontières du rock tribal, du psychédélisme et de l’ambient avec Psychic TV. Cette semaine sort « Hell is Invisible… Heaven is Her/e » (Sweet Nothing/Differ-Ant), premier album studio de PTV depuis onze ans, récit d’« expériences corporelles et spirituelles entre mort et résurrection » auquel ont participé Nick Zinner, de Yeah Yeah Yeahs, personnage central de la nouvelle scène new-yorkaise, ou Gibby Haynes, des Butthole Surfers. Un événement pour tous les amateurs de rock expérimental. Impossible de retracer la carrière de ce personnage singulièrement déviant (d’autres le font très bien ici ou ici), activiste sonique, performer underground et écrivain post-situ, sans qui Marilyn Manson, Aphex Twin, Alec Empire ou Nine Inch Nails, entre autres, n’auraient sans doute jamais existé. « Mon corps est une rébellion, le plaisir est une arme », assène, dans une remarquable interview sur la chaîne en ligne de « Vice Magazine »(3) cet adepte de la « positive angrogyny », devenu blonde platine à l’opulente poitrine. En talons aiguille, bas résilles et minijupe, ses concerts sont d’authentiques performances. Quelques repères quand même. Genesis P-Orridge a hurlé pendant cinq ans comme personne ne l’avait jamais osé au sein de Throbbing Gristle (leur morceau le plus accessible), quatuor d’une radicalité inouïe (voire inaudible) qui fait passer les punks qui s’agitent alors (on est en 1975) pour de gentils élèves du conservatoire. Au premier rang des fans, les écrivains beat William S. Burroughs et Brion Gysin, dont P-Orridge fut très proche, sidérés par son adaptation de la technique du cut-up à la musique. Leurs 38 concerts anthologiques, comme autant d’attentats sonores, ont tellement marqué les esprits qu’ils sont quasiment tous disponibles en CD. Et qu’on donne aujourd’hui au groupe le statut de Velvet Underground des seventies. La mise à bas des tabous, l’activisme politique et les provocations sexuelles (« throbbing gristle » est une expression argotique pour « pénis en érection ») sont au cœur de la démarche de l’artiste depuis quarante ans, quand, sous le nom de Neil Andrew Megson, il participait au scandaleux collectif de performers sous influence Fluxus, COUM Transmissions. Avec Psychic TV, lancé au tournant des années 80, P-Orridge est devenu l’un des pionniers de l’acid house britannique (il organisera des raves en Angleterre dès 1987), avant de s’ouvrir aux expérimentations à la Sun Ra, qui font le meilleur de « Hell is Invisible… Heaven is Her/e ». Sur lui courent les rumeurs les plus folles, qu’il entretient savamment. Il raconte qu’il est le dernier à avoir parlé à Ian Curtis, la voix de Joy Division, la nuit de son suicide. On le dit sataniste et violeur d’enfants. En 1992, Scotland Yard fera même une descente dans sa maison après la diffusion à la télé, hors contexte, d’images d’une performance vidéo dénonçant la pédopornographie. Retiré au Népal, il préfére alors s’installer à New York, où il vit toujours, plutôt que de tenter le diable à Londres. 2007 pourrait bien être son année. En mai, Throbbing Gristle reformé a sorti un nouveau disque terroriste (chez Mute bien sûr) après vingt-cinq ans de silence. Et ce « Hell is Invisible… Heaven is Her/e », de Psychic TV (70ème album !), plus abordable musicalement, pourrait permettre à ce père de famille (deux filles, Genesse et Caresse, sic) de sortir de l’ombre. Il n’est pas dit que ça plaise à ce sale coucheur, qui dézinguait à tout-va dans le docu rock « Dig ! » qui l’a fait connaître à la jeune génération. Il pourra alors reprendre un de ses faux-nez (Thee Majesty, etc.) et continuer à faire encore et encore de la musique : à ce jour, il a enregistré plus de 200 références. (1) Extrait de Jazz magazine (2) A lire, cet excellent texte sur ce pan mal connu des musiques électroniques. (3) Voir aussi les deuxièmes, troisièmes et quatrièmes parties de l’interview.
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commentaire
écrit le < 31'05'07 > par <
elebovici 3oL club-internet.fr
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Gloups, encore une lampée, jusqu’au gavage et plus si affinités. J’ai connu Genesis en 1975 à la Biennale de Paris, lorsqu’il formait, avec Cosey Fanny Tutti, le groupe COUM (évidemment dérivé de CUM, foutre) de plasticien(ne)s plastiqueurs de bon goût, et autres goûts d’ailleurs. Ils/elles foutaient déjà le boxon, proposant la fornication et la prostitution en guise de performances. Il y avait alors, une salle consacrée au transvestisme, avec Urs Lüthi et Luciano Castelli. C’était très fort. Et puis, Throbbing Gristle est venu.
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