Nicolas Frespech, net-artiste que poptronics aime (et vice-versa), a visité les 40èmes Rencontres de la photographie à Arles, soit 60 expositions à travers la ville jusqu’au 13 septembre (certaines expositions ferment le 30/08).
"Nan et Brian au lit, New York, 1983", photo tirée de la série de Nan Goldin "The Ballad of sexual dependency". Nan Goldin est l’invitée spéciale des 40èmes Rencontres de la photographie d’Arles. © Nan Goldin
< 02'09'09 >
Arles à tu et à toi avec Nan Goldin
(Arles, correspondance particulière) Nan Goldin est l’invitée spéciale des 40èmes Rencontres de la photographie à Arles, l’occasion idéale d’aller découvrir ses créations, dont le célèbre diaporama « The ballad of sexual dependency » (jusqu’au 13/09), où tout un pan de son existence défile sous les yeux de spectateurs bouleversés. Ce diaporama qui évolue constamment a déjà été présenté à Arles en 1987. Mais avec l’avènement du Net, le rôle de l’image a considérablement évolué depuis cette date. L’intimité n’est plus assujettie à cette idée d’exhibitionnisme, tout un chacun fait circuler sur le réseau images et vidéos persos, on peut même réaliser en quelques clics un diaporama sur sa sœur ou sur tous les anniversaires de son chien. Quelques perles rares à dégoter sur le Net, mais n’est pas Nan Goldin qui veut... Le passionnant triptyque « Sœurs, Saintes et Sibylles » (jusqu’au 30/08), mixant photos et vidéos sur une bande-son où l’on peut entendre Daniel Darc chanter « ma vie, elle ne vas pas assez vite, alors je l’accélère… » (« Le Feu Follet ») parle du suicide de Barbara, la sœur de Nan Goldin. Un mélange de ses archives où l’on voit sa sœur vivante, et de photos contemporaines où Nan Goldin se rend sur les différents lieux d’internements de sa sœur et les siens. L’artiste explique : « Au lieu de me suicider, j’ai commencé à prendre des photos… » Cette reconstitution sensible l’aide à renaître à travers un diaporama éprouvant et rédempteur. Nan Goldin a eu aussi la bonne idée d’inviter des amis. L’exposition « Ça me touche » (jusqu’au 13/09) montre que les amis de Nan Goldin font plutôt de la bonne photo. Jean-Christian Bourcart cherche sur Google « La ville la plus dangereuse des Etats-Unis » et se rend à Camden, dans le New Jersey, pour y réaliser une série de photos sur l’exclusion et la violence d’une ville abandonnée. Encore un autre diaporama, « Shades of time » (« Les ombres du temps »), de la Suissesse Annelies Strba qui photographie ses enfants, son compagnon et quelques années plus tard ses petits-enfants… plus de 20 ans de photos de son intimité résumées en 245 diapositives. L’Américain Leigh Ledare présente un documentaire photographique, « Pretend You’re Actually Alive » (« Fais semblant d’être en vie »), qui évoque ses rapports complexes et quasi incestueux avec sa mère : troublant et émouvant. Ailleurs, un diaporama contradictoire de Martin Parr : « Luxury » (jusqu’au 13/09). Martin Parr n’est pas invité par Nan Goldin et on comprend pourquoi. Défilent des portraits de riches portant de beaux chapeaux et buvant du champagne tout autour de la planète. Photos réalisées avant l’arrivée de cette « soudaine » crise économique mondiale. Mauvais goût ostentatoire : c’est beau, c’est coloré, c’est du Martin Parr. Je me souviens d’un reportage mode que le photographe britannique avait réalisé au Maroc pour « Madame Figaro » en janvier 2009. Dans le souk, un homme se promène avec une valise Vuitton... Devant moi, alors que j’écris cette chronique, la pochette de la compilation des « Inrockuptibles spécial Eté 2009 ». Une main avec du vernis rouge qui tient un cocktail où baignent de petites cerises. C’est glam, c’est encore Martin Parr ! Retour à Nan Goldin qui présentait (jusqu’au 30/08) sa propre collection de photographies, désormais sa principe activité. Quel plaisir de voir ceux qu’elle aime : Pierre Moulinier, Christer Strômholm, Larry Clark... Arles, c’est une somme d’expositions trop nombreuses pour une seule chronique. En vrac mais impossible de les passer sous silence, le bouleversant « Without Sanctuary », des « cartes postales » collectionnées par James Allen de scènes de lynchage dans l’Amérique jusqu’au début des années 50, et le doyen des Rencontres, Willy Ronis, 99 ans et un regard historique sur un monde qui paraît révolu, celui de la photographie argentique (jusqu’au 30/08). Le petit plus de l’édition 2009, c’est la médiation culturelle techno, riche et innovante. En partenariat avec un opérateur de téléphone mobile, les Rencontres d’Arles proposent d’accéder sur son propre téléphone à une visite guidée, basée avant tout sur une « conversation » avec les artistes invités. J’ai ainsi eu le plaisir d’entendre Nan Goldin me susurrer à l’oreille : « Pour moi, ce qui est privé est aussi politique et la sexualité engendre des questions politiques. » Les possesseurs d’iPhone peuvent télécharger l’application sur l’App Store. Et si vous n’avez pas de téléphone, il reste le site Internet des Rencontres, qui propose tous ces sons en téléchargement gratuit. Une démarche de vulgarisation culturelle à saluer. D’autant que même les photos « haute définition », habituellement réservées à la presse, peuvent être consultées par tous.
Cybernétique en papillotes
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