accès(s), 9ème édition du festival des cultures électroniques à Pau du 12/11 au 23/12.
accès(s), 9ème édition du festival des cultures électroniques à Pau du 12/11 au 23/12.
"Coagulate" de Mihai Grecu, une vidéo qui suspend le temps et l’espace. © DR
< 25'11'09 >
Chemin d’Accès(s) aux cultures électroniques à Pau
(Pau, envoyé spécial)Les cultures électroniques sont-elles solubles dans les vins du Jurançon ? C’est une des questions que pose le festival Accès(s) jusqu’au 23 décembre dans l’agglomération paloise, face à la chaîne des Pyrénées, avec un crochet par Bordeaux. Une neuvième édition en forme de GR du numérique, pluridisciplinaire et vivant, au croisement de l’art vidéo, de l’installation multimédia, du dispositif sonore, de la performance et de la production. Tout un écheveau de propositions reliées par une thématique, la relation au temps. « Nous avons choisi ce thème à un moment de notre histoire où nous ne parvenons justement plus à prendre notre temps », souligne le directeur Nicolas Charlet, par ailleurs écrivain, théoricien et spécialiste du Nouveau réalisme. « Nous voulons creuser la question de la relation au temps dans une société hyper-technologique qui nous relie aux tuyaux de l’information. Réseaux sociaux, téléphonie mobile, nous sommes tous, dans notre quotidien, soumis à une accélération des choses, et c’est la raison du sous-titre de ma sélection d’œuvres du Fresnoy, “Le temps suspendu”, le temps ralenti, la mémoire sonore ou l’écriture soumise à une temporalité différente. » Temps suspendu, étiré, propulsé, diffracté Au cœur du week-end dernier figurait l’ouverture de ladite exposition au Pôle Culturel Intercommunal de Billère, à un jet de pierre de Pau. Nicolas Charlet a pioché dans le catalogue du Fresnoy pour en extraire une poignée de pièces fortes, parfois rarement vues en-dehors des prestigieux murs de l’école de Tourcoing. Parmi les travaux les plus significatifs, et qui prennent un relief particulier car vus en-dehors du rituel Panorama aux airs de fourre-tout souvent indigeste, « Naufrage » : Clorinde Durand suspend en effet, et tout à fait littéralement, le temps. Pastiche de film-catastrophe ? Chorégraphie absurde en HD ? Clip géant ? Pub ? Dans un décor minimal (un mobilier fonctionnel), des femmes en complet strict et des hommes cravatés sont propulsés dans l’air (de l’entreprise), tordant leur corps en un mouvement ample et ralenti à l’extrême. Ces cascades chorégraphiques surgissent ex-nihilo, sans motivation apparente, et c’est bien ce hors-champ qui crée la force de ce film tourné avec une caméra 2K Phantom permettant des prises de vues à 2.000 images/seconde, pour un effet proche de l’hypnose pour le spectateur. Making-off de « Naufrage », de Clorinde Durand : Une autre pièce se détache, sorte de jumelle de « Naufrage » : « Coagulate », de Mihai Grecu, qui met en scène un univers en mutation modifiant les perceptions. De l’homme ou du poisson immergés dans une piscine, on ne sait plus vraiment qui est quoi. Là aussi, le temps est diffracté, l’espace bouleversé. On songe à l’esthétique, léchée et froide, de Daniel Askill (« We Have Decided Not To Die »), dans cette vidéo à la poésie très saillante. D’autres œuvres questionnent le mouvement du temps (« Le temps manquant », la vidéo qui fit découvrir Laurent Grasso en 2002) ou la mémoire : « Bien des choses », les cartes postales interactives et sonorisées de Cléa Coudsi, « For Ever » de Laurent Pernod, installation de 2004 dans laquelle des images sont projetées sur une robe de mariée et les corps se superposent jusqu’à faire surgir l’inquiétude. Sans oublier le « Totem » de Maïder Fortuné (2001), vidéo qui étire littéralement le temps. On y voit l’artiste sautant elle-même à la corde, un geste de l’enfance ici distordu, modifié à l’extrême et qui flingue la nostalgie. Joakim limite Kosmiche Entre les murs épais du PCI, ces anciens abattoirs transformés en friche culturelle, en proche banlieue de Pau, l’exposition 2009 d’Accè(s), dont l’intérêt n’est jamais saturé par le parti pris conceptuel, est au final compacte et touffue. Le goût des contrastes est un des ferments d’Accès(s) qui propose depuis ses origines des concerts de musiques électroniques et de rock en parallèle aux performances et expositions. Deux champs que synthétise à sa manière le Parisien Joakim, boss du label Tigersushi et auteur d’une poignée d’albums ambitieux et parfois mal compris. Avec le récent « Milky Ways », il brouille encore plus les pistes en entrelaçant des plages planantes et des saillies rock, limite Kosmiche, son dada depuis qu’il a monté son groupe (le fantasme de beaucoup de DJ’s lassés des platines). Son concert, vendredi dernier, dans un Ampli à moitié vide (Pau wake up !), après celui, assez terne, des revivalistes new-wave Cercueil, fut un grand moment de disco malade, envisagée du côté des fins de nuit glauques plus que des paillettes. Chez Joakim, le rimmel fond avec tristesse, même si les rythmes (batterie, machines et basses) emportent le danseur dans un drôle de pantomime. Les micro hits sont joués comme à la parade (« Wish You Were Here », « Lonely Hearts »), soutenus par une guitare au cordeau. Joakim - « Lonely Hearts », clip réalisé par Camille Henrot) : Du lien social façon zérographie Bien obligé de s’adonner au jeu des subventions et des bonnes relations avec les édiles, le festival Accès(s) est officiellement très soucieux de « tisser du lien social à travers des propositions artistiques nouvelles, parfois expérimentales ». « Elles fédèrent les acteurs locaux et font découvrir de nouvelles pratiques », explique Nicolas Charlet. Une démarche favorisée cette année par la mise en réseau des médiathèques de l’agglomération paloise -l’architecte star Zaha Hadid avait été sollicitée pour concevoir une grande médiathèque, un projet qui ne verra jamais le jour. Le festival a donc demandé au « zérographe » (c’est lui qui le dit) Franck Ancel de réfléchir à un projet liant nouvelles technologies, mise en réseau et édition. Celui-ci a demandé à Claire Morel (auteur de livres qui détournent, caviardent, en un mot reformulent des livres de Maurice Blanchot, des « Que Sais-je ? » et bientôt du Marguerite Duras, au Frac Alsace) de concevoir un livre à la fois imaginaire et bien réel, dont le « texte » reprend le code-source du référencement dans le catalogue de l’intranet du réseau des médiathèques. Il y a du Borgès, du Gibson (l’auteur du culte « Code Source ») et de la culture hacker dans ce petit livre d’une centaine de pages remplies de code. Un objet tout autant conceptuel que véhicule d’érudition et de curiosité pour esprits voyageurs. Claire Morel et Franck Ancel se retrouveront début décembre au Centre Pompidou à l’occasion du salon Artistbook, pour un travail autour du fameux « Livre » de Mallarmé. Une vibration finale... en téléphérique Accès(s) se poursuit en décembre avec notamment la performance/installation « Corpus, Architecture et sonorités » des artistes sonores Nicolas Maigret et Nicolas Montgermont. Derrière cet intitulé pour le moins réfrigérant se dissimule une expérience physique plutôt singulière : il s’agira de la mise en vibration le 4 décembre du funiculaire de Pau, reliant la gare au Boulevard des Pyrénées, suivie le 11/12 par celle de la Pyramide de l’Ecole d’architecture de Bordeaux. Un projet qui mélange réflexion sur la ville, le son et l’expérience sensible. Le festival consacrera ensuite deux soirées à la référence en matière d’imagerie numérique, onedotzero (les 11 et 12/12) au Méliès, le valeureux cinéma art et essai de Pau. Un programme alléchant, donc, et qui trouvera peut-être sa concrétisation en juin 2010 : l’équipe d’Accès(s) étant sollicitée pour assurer la programmation des Chemins électroniques du Jurançon, qui, comme leur nom l’indique, mêleront œnologie et cultures numériques (installations et performances), au beau milieu des côteaux et des chais. On y reviendra, évidemment !
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