« Tableaux/Bilder », catalogue de Nina Childress, présentation à la galerie Bernard Jordan, 77 rue Charlot, Paris 3ème, le 28/06, de 16h 19h en présence de l’artiste, direction artistique christophe jacquet dit toffe, Semiose éditions, 20€.
« Bibliothèque », 2005, huile sur toile, Nina Childress, entre jeu sur la reproduction photo et « flou artistique ». © DR
< 28'06'08 >
Nina Childress, échantillon d’art stupide mais pas sot

Ce samedi, à la galerie Bernard Jordan, Nina Childress signe « Tableaux/Bilder », monographie parue aux éditions Semiose sous la direction artistique de Christophe Jacquet dit Toffe (celui-là même qui a désigné poptronics). Nina Childress, née à Pasadena en 1961, s’est formée à bonne école, d’abord aux Arts décoratifs à Paris à l’orée des années 80, elle devient ensuite membre du groupe punk Lucrate Milk puis intègre la bande des Frères Ripoulin. Ce nom vous évoque vaguement quelque chose, rien de plus normal, à l’époque elle était constituée de Claude Closky, de Pierre Huygue, d’Ox etc.

Le catalogue, d’une rare élégance dans la mise en page et en forme des œuvres, laisse découvrir au fil du texte et des vignettes les sources et les œuvres de cette artiste contemporaine qui revendiquait alors de faire de la « peinture conceptuelle et idiote », comme elle le dit dans l’entretien dans la monographie. Ni sotte, ni naïve, ses productions souvent sérielles déclinent les stéréotypes, les objets (« Intérieur rustique » en 2005 puis « Entrée » en 2007) et les produits publicitaires (comme le savon notamment avec la toile « 3 formes camay » en 1992) dans des tons chauds.

Lorsqu’elle s’intéresse aux journaux, Nina Childress se saisit de l’aspect midinette fleur bleu du roman photo pour y introduire une dose d’étrangeté, décalant l’écrit par rapport au motif comme dans son triptyque « Photo-Roman » (1982). Passage de la photographie à la peinture, le changement de support induit inévitablement une autre approche et une autre signification. L’inversion des termes n’a rien d’anodin : du roman-photo au photo-roman ou comment explorer les codes d’un genre, « flirter avec les poncifs », résume l’un des textes de la monographie. Prendre comme motif un tableau peint accroché sur fond de papier peint fleuri, en rendant le motif de la composition indiscernable : loin du jeu tautologique, c’est un autre déplacement qu’elle suggère où le fond est plus important que le motif, dans un jeu subtil sur la netteté et le flou photographiques.

Stéréotype encore lorsqu’elle développe puis décline ses séries sur les cheveux (« Vertical hair piece » en 1997, « Black hair 2 » en 2004) dont on suppute qu’elle s’est inspirée des catalogues de coiffeurs. Nina Childress ne cède ni au fétichisme, ni à la référence à la mèche découverte dans un tiroir de Maupassant. Dans sa typologie des coupes féminines, le genre s’oublie peu à peu. Il ne s’agit pas de changer de tête, ce ne sont pas non plus des postiches et perruques, mais ces coiffes verticales révèlent quelque chose de plus essentiel sur la matière même : le fusain convoque d’autres jeux d’ombres et les cheveux deviennent de simples surfaces striées…

cyril thomas 

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