Festival Trace(s) de Bagnols-sur-Cèze, 2ème édition, du 15/05 au 5/06.

(Exposition « Mirages »), du 15/05 au 5/06, Chartreuse de Valbonne, Saint-Paulet-de-Caisson, 10h-12h30 et 14h-18h, rens. : 04.66.50.50.18 et 04.66.90.41.24, invitation gratuite à retirer à l’Office du Tourisme.

(Exposition « Nature Humaine »), du 16/05 au 4/06, Centre d’art rhodanien Saint-Maur de Bagnols-sur-Cèze, 10h-12h et 15h-19h, fermé le dimanche, rens. : 04.66.50.50.18.

(Exposition « Répétition »), du 24/05 au 5/06, galerie La Mezzanine, Bagnols-sur-Cèze, mercredi 9h30-12h30, jeudi, vendredi et samedi 9h30-12h00 et 14h30-18h00, rens. : 04.66.50.50.18.

Il faut aller à Bagnols-sur-Cèze pour voir en France la première exposition d’Erdal Inci, qui présente des Gifs animés chorégraphiques (ici en mode figé), dans le cadre du festival Trace(s). © Erdal Inci
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Trace(s), un festival pour faire pousser la culture en plein désert

(Bagnols-sur-Cèze, envoyée spéciale)

Le numérique a-t-il vocation à repeupler les déserts culturels ? Pour sa deuxième édition, Trace(s), « festival des arts numériques », promène ses propositions sur le territoire nord-gardois depuis le 15 mai et jusqu’au 5 juin. Poptronics est allé voir qui sont ces nouveaux prêcheurs qui portent la bonne parole digitale. Reconduisant le ballon d’essai de 2013, le festival de Bagnols-sur-Cèze mixe arts vidéo, contemporain et numérique, en disséminant dans la petite ville de 18000 habitants et ses environs plusieurs expositions, projections et bornes interactives.

Touché par la grâce digitale. « Ce festival préfigure l’émergence du pôle d’excellence numérique gard-rhodanien qui devrait sortir de terre en 2016 », explique Cyril Delfosse, de la direction des affaires culturelles de la ville, en charge d’une partie de la programmation. Car étrangement, ce n’est pas comme on pourrait s’y attendre le tissu associatif qui porte l’événement, mais la municipalité, qui met sa foi dans le bien-fondé de la manœuvre. “Le pôle favorisera, entre autres, le développement de la création vidéo et numérique, les expositions et le spectacle vivant. Mais le festival permet déjà de mettre en lumière le patrimoine historique”, précise-t-il. Une manière maligne d’injecter un peu de création contemporaine dans une ville qui en est fort dépourvue et, par la même occasion, de valoriser le riche patrimoine local de la vallée de la Cèze.

Ainsi, l’exposition « Mirages » prend ses aises à la Chartreuse de Valbonne avec un parcours autour de l’immatérialité et des images sans objet. Les œuvres d’une dizaine d’artistes envahissent les chapelles du monastère, planqué au creux d’un vallon forestier. Parler mirages et perception de l’infini dans un cloître, il fallait quand même oser !


« Songshan » (2011) de l’allemand Dieter Jung accueille les visiteurs à l’entrée du monastère. © C. Claude

En guise d’introduction, deux hologrammes de Dieter Jung jonglent entre arts optique et virtuel. Plus loin, devant un autel de marbre du XVIIIe siècle, l’installation vidéo « Glucose » de Mihai Grecu et Thibault Gleize s’amuse des aberrations visuelles en mêlant astucieusement prise de vue réelle et animation 3D. Ce court-métrage anxiogène et humoristique distord l’environnement domestique. Séquence clin d’œil : une religieuse fumante –la pâtisserie, pas la nonne– apparaît, telle une mini-centrale prête à exploser.

« Glucose » (2012), Mihai Grecu et Thibault Gleize :

Moins convaincant, « Oscar » (2005) de Catherine Ikam et Louis Fleri –la surenchère technologique est passée par là– laisse le badaud de glace. Plus loin, en enclenchant le dispositif « Intrus/Intruders » (2013) de Grégory Chatonsky, le même lâche : « Ça fait peur, non ? » Les visiteurs sont venus, malgré un accès qui se mérite, les moines ermites n’ayant pas choisi l’emplacement pour rien. Dans la salle du Chapitre, se joue la confrontation intéressante d’une œuvre ancienne de Bill Viola, « Chott el Djérid » (1979) et de la plus récente « Inner Passage » (2013), choisies par Jean-Paul Fargier, membre du comité de sélection et réalisateur d’un film sur le pionnier américain de l’art vidéo, dont on peut voir la rétrospective en ce moment au Grand Palais.

Ailleurs, les visiteurs se roulent dans le voile « Metamorphy » (2014) pour générer de la matière sonore et lumineuse. Les auteurs, le duo Scenocosme formé par Grégory Lasserre et Anaïs met den Ancxt, présentent également « Akousmaflore » (2008), leur jardin suspendu réactif assez conventionnel, dans l’exposition « Nature Humaine » en centre-ville.

« Solar Sinter » (2011), Markus Kayser :

Explorant l’interdépendance entre l’homme et le monde vivant, on retrouve dans cette autre exposition des vidéos, dont certaines anciennes, comme « L’Arc en ciel » (2001) de Richard Skryzak et « Volte face » (2004) de Reynald Drouhin. On leur préfère le « Solar Sinter » de Markus Kaiser, qui fond le sable du désert afin de fabriquer des objets 3D en verre, la fresque « Street Views Patchwork » de Julien Levesque et les « Points de repères » du Canadien François Quévillon, une vidéo générative virtuose qui utilise des données météorologiques pour numériser en 3D le plateau de Montréal.


« Points de repères » (2013), de François Quevillon, où l’image de Montréal est reconstituée à partir de données environnementales mesurées sur un an, qui défilent au rythme d’une journée par seconde. Ethéré et efficace. © François Quévillon

La belle découverte. Il fallait venir jusqu’à Bagnols-sur-Cèze, donc, pour apprécier la première exposition de GIFs animés en France de l’artiste turc Erdal Inci, à la galerie La Mezzanine. Une jolie suprise en effet…


« J’aime travailler seul dans l’espace public et me chorégraphier moi-même. Le plus amusant est que les gens ne se rendent pas compte que je me filme, ils doivent se demander ce qui m’arrive ! » © Erdal Inci

Pour son exposition « Répétition », l’artiste obsédé par la boucle, l’hypnose et les distorsions temporelles, s’aventure dans la perception du bizarre avec ses autoportraits chorégraphiques. Pourquoi recourir au format un peu désuet (voire…) du GIF animé ? « J’ai démarré mes séries en vidéo en 2008, mais je n’arrivais pas à obtenir une boucle parfaite, ce que me permet au contraire le GIF. »

Le résultat est gracieux, poétique et finement réalisé. Et il a la cote. Après avoir été sélectionné pour Art Basel Miami en 2012, Erdal Inci confie que les collectionneurs s’intéressent de plus en plus à son travail. Loin des GIFs maintream et passablement ratés du Motion Photography Prize lancé par Google et la galerie Saatchi…

Carine Claude 

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