LePost, BibliObs, Rue89, une nouvelle vague de journalisme participatif en France.
Le schéma de Julien Jacob pour représenter les différents modules de participation. © Julien Jacob
< 14'09'07 >
« Impliquer l’audience pour revenir au journalisme »

La participation, c’est un peu comme le chocolat pour le moral, un ingrédient indispensable des pratiques sur le Net. Newsgroups, IRC, forums, chats… les discussions on line ont d’abord occupé le devant de la scène, puis les blogs sont arrivés, et avec eux, les commentaires et les liens de plus en plus croisés entre sites. Il fallait bien que les médias (les fabricants de l’information) s’y intéressent et agitent eux aussi le petit drapeau du participatif.

Avec l’avènement du Web 2.0 (une sorte d’accélérateur marketing des concepts du Web à papa, voir à ce sujet leur héraut, l’inénarrable Loïc Le Meur), les projets éditoriaux ont fleuri. Cette rentrée voit le lancement simultané du projet tenu par le Monde interactif, LePost, et celui du Nouvel Observateur avec BibliObs (sur les livres, comme son nom l’indique), conçu par Rue89, qui avait lancé le mouvement au printemps.

Poptronics est allé chercher un spécialiste de la question, Julien Jacob, co-fondateur d’Obiwi, le magazine « où les passionnés partagent leurs infos et leurs réseaux » (ouverture fin septembre). Julien Jacob est vice-président du GESTE (Groupement des éditeurs de services en ligne) et auteur d’un blog sur les business modèles des médias interactifs.

Avec Obiwi, vous avez acquis une certaine expertise en matière de projets éditoriaux collaboratifs et participatifs. Quel est votre avis sur les deux projets lancés cette semaine, LePost et BibliObs, deux émanations de médias traditionnels (le Monde et le Nouvel Obs) misant sur la participation des internautes ?

« C’est la question que l’on a arrêté de se poser dans les médias en France depuis la fin des années 80… Les chutes d’audience du papier et de la télévision sont aussi dues au fait que rien n’innovant, de réellement nouveau n’a surgi depuis. Je viens moi-même des médias traditionnels (papier puis Internet) et je crois que nous poursuivons tous le même but : innover pour répondre aux nouvelles attentes de notre audience. J’étais mercredi à la soirée du Monde Interactif et nous avions le même discours : LePost dans l’actu et Obiwi dans le magazine. Ce qui fait que nous prenons des chemins parfois différents, mais tout à fait cohérents avec nos positionnements respectifs. J’ai les mêmes discussions avec Rue89 (qui a développé BibliObs pour le Nouvel Obs). Je pense donc le plus grand bien de ces projets et des gens qui les font. Nous sommes d’ailleurs en contact fréquent. »

La multiplication des projets où le statut de l’auteur n’est pas clairement lisible va-t-elle dans le sens qu’attendent les internautes, selon vous ?

« La question est orientée ! Les médias institutionnels qui n’engagent pas ce dialogue avec leur audience sont amenés à mourir. Et participer, ce n’est pas réagir par un commentaire à un contenu signé par quelqu’un d’inaccessible, c’est être au cœur du processus de création du contenu. C’est ce que nous faisons tous : impliquer dans notre processus éditorial l’audience qui a des informations intéressantes, tout en conservant les professionnels pour ajouter de la valeur. »

Les médias sont victimes à la fois d’une crise de confiance et d’une crise économique sans précédent en France. Ce genre de projet est-il l’avenir de l’information ? A terme, pensez-vous que les journalistes professionnels disparaîtront ?

« Je pense qu’on n’a jamais autant eu besoin des journalistes professionnels qu’aujourd’hui, mais que ces derniers ne l’ont pas encore compris. Si une communauté fait le travail d’un journaliste professionnel, il doit devenir encore meilleur qu’il ne l’était avant. Son boulot devient de plus en plus valorisé et il est amené à collaborer avec son audience - c’est pour elle qu’il travaille non ? Je crois au contraire qu’on revient aux bases de ce que devrait être le journalisme. »

annick rivoire 

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