Les 22e Etats généraux du film documentaire, du 22 au 28/08/10, à Lussas, en Ardèche, organisaient les 23 et 24/08
un séminaire « Écritures numériques », coordonné par Pierre-Oscar Lévy. Nicolas Frespech, artiste et chroniqueur multi-occasionnel de poptronics, en revient.
Lussas, en Ardèche, accueille les Etats généraux du film documentaire et s’intéresse cette année au webdocumentaire. © Nicolas Frespech/LAL
< 27'08'10 >
Le webdoc s’invite aux Etats généraux du documentaire de Lussas
(Lussas, envoyé spécial) Retour de Lussas, en Ardèche, où se tiennent les Etats généraux du film documentaire. Une programmation exigeante pour faire le point sur le doc d’hier, d’aujourd’hui et de demain. A propos de demain, j’assiste à un séminaire sur le webdocumentaire. Ça tombe bien, j’essaie d’en faire un depuis presque un an et j’ai bien besoin de faire le point depuis l’édition 2006 du Web Flash Festival consacré à ce sujet ! Chercheuse au CNRS, Clarisse Herrenschmidt est invitée à nous parler de l’écriture et plus particulièrement de l’écriture numérique. Elle remonte à ses origines pour nous mener à Alan Turing, qu’elle considère comme l’inventeur du premier ordinateur conceptuel, jusqu’aux « nouvelles écritures » utilisées dans la création informatique. En passant, j’ai appris qu’Alan Turing s’était suicidé en croquant une pomme empoisonnée et que le logo d’Apple en était certainement inspiré. Clarisse Herrenschmidt est passionnante, elle mériterait d’être l’unique sujet d’un webdoc sur la vulgarisation scientifique ! Une fois les bases scientifiques posées, place à Alexandre Brachet, le patron du site Upian et producteur de webdocs. Alexandre pratique le Net culturel depuis longtemps et partage avec le public son retour d’expériences tout en dressant son histoire du webdocumentaire. Le public est un peu nerveux : parler de webdoc à un public passionné, connaisseur de documentaires « à l’ancienne », c’est un peu risqué. Une personne dans le public s’interroge sur l’intérêt de narrations non linéaires comme à la grande époque du CD-Rom culturel… Vraies questions ou problème culturel générationnel ? Du côté du Net, et oui, pas besoin d’aller dans une salle de cinéma ou de rester devant sa télé, le webdoc se consomme à la demande ! La rubrique « webdocumentaires » du site du « Monde » propose par exemple « Mon catcheur, ce héros » (2009), composé d’un diaporama avec une bande-son et de boutons pour accéder à un autre chapitre pour découvrir l’univers du catch... Ouais, très cédérom effectivement et déjà presque un peu daté. Webdoc 2.0 Depuis la généralisation d’un accès haut débit et la fameuse ou mythique interactivité des internautes Web 2.0, la production de webdocumentaires a changé. Sur le portail dédié aux webdocs d’Arte, on peut voir une des productions d’Upian, « Havana-Miami » (2010), ainsi présenté par la chaîne culturelle : « Ils ont entre 12 et 38 ans. Ils sont cubains. Six d’entre eux vivent à La Havane. Les six autres à Miami. 150 kilomètres les séparent. Dans ce webfeuilleton tourné en direct, pendant trois mois, du 22 février à la mi-mai 2010, l’internaute découvre en simultané le quotidien de ces douze personnages, restés au pays ou vivant en exil. » Mais le webdoc dont tout le monde parle, c’est « Prison Valley », toujours produit par Upian. Il est « exemplaire » car illustre parfaitement la convergence des écrans, le fameux crossmedia, pardon transmédia en français, un webdoc pour tous les supports ! Coproduit par la chaîne franco-allemande avec « Libération », il a été diffusé sur le Net, via un site dédié, mais on pouvait aussi suivre l’évolution du projet via Twitter. Puis est venu le passage télé, au début de l’été, sur cette plongée dans l’univers de Cañon City, au Colorado, le comté américain aux treize prisons. On peut même télécharger une application iPhone. « Prison Valley », 2010, extrait du webdoc de David Dufresne et Philippe Brault : L’interface du site permet d’accéder à différents modules sonores et visuels, on peut aussi suivre le blog et commenter les vidéos sur le thème des prisons. Un sujet porteur, une réalisation léchée, « Prison Valley » est un succès, tant du côté des critiques que des internautes. Moins exotique mais un projet que j’ai adoré, en 2008, c’est « Twenty Show » (2008), un documentaire sur la net génération par la net génération. Des jeunes se mettent en scène en vidéo grâce à leur webcam sur le site de la chaîne. Le « premier "user generated film", monté à partir de vidéo-blogs fictionnels et réels », annonçait Arte. On pouvait publier ses propres vidéos, mais comme je n’ai plus 20 ans depuis déjà longtemps, je n’ai pas osé ! Un montage de 90 minutes a été diffusé à la télé en 2009. Question : est-ce que le webdoc peut se passer de la télévision ? Extrait de « Twenty Show » : les baskets Le développement des nouveaux supports permettra-t-il la conquête d’un nouveau public ? Ou alors celle de nouvelles écritures grâce à l’utilisation par exemple de la géolocalisation ? Nouveaux publics ? Jusqu’à présent, les interfaces sont quasi exclusivement en Flash, un logiciel propriétaire qui soulève quelques interrogations sur la transportabilité de la réalisation et surtout sur la conservation des œuvres. Mais les temps changent et Alexandre Brachet envisage de futures productions dans un standard prometteur : le HTML 5 (Hypertext Markup Language version 5, la dernière version du langage de programmation des pages web). Quelles sont ses motivations pour faire cette petite révolution ? L’arrivée de l’Ipad et la guerre des formats entre Apple et Macromedia. Et oui, les productions en Flash ne passent pas sur les produits populaires de la marque à la pomme... et c’est autant de spectateurs en moins en plein questionnement sur la fin du Web ! Facebook sera-t-il l’unique lieu virtuel de diffusion ? Comment faire venir le public au webdocumentaire si on n’est pas Arte, « Le Monde » ou France 5 ? Linéaire, explosé, interactif, en temps réel... c’est un peu la foire du côté du webdoc ! Afin d’y voir plus clair, le journaliste Emiland Guillerme, qui a fait son mémoire de Master 2 sur ce sujet, est allé à la rencontre d’Andrew DeVigal, chef du multimédia au « New York Times » : « L’interactivité permet de personnaliser l’expérience, explique-t-il. Et il y a des circonstances pour cela, tous les types de narrations ne sont pas adaptés à l’interactivité. D’autres vont naturellement amener à l’interaction ou même la rendre nécessaire pour bien comprendre un sujet. Mais si elle est forcée, elle peut très bien détruire un récit. » Le webdoc à la maison Si vous avez l’envie de vous y mettre, il vous faut juste un APN, une caméra et un dictaphone. De nombreux outils gratuits sont disponibles en ligne pour vous lancer dans la production de votre webdoc maison en quelques clics ! Soundslide permet de faire un diaporama sonore avec des fondus enchaînés, Scrivener est un logiciel d’aide à l’écriture, Mix vous offre la possibilité de monter un site Flash... presque comme les sites des pros du doc ! Le webdoc est-il un genre déjà tradi ? Pourquoi ne pas s’aventurer dans d’autres pratiques du webdocumentaire en inventant de nouvelles narrations et de nouveaux moyens de diffusion ? Si vos ambitions dépassent le cadre familial et que votre webdoc sur vos vacances à la mer ou la quête d’un job au pôle emploi est un « sujet vendeur », Arte vous invite à soumettre vos projets. Encore faut-il tenir un « sujet vendeur » ! Quant à moi je retourne à ma tentative de documentaire en train de se faire... ou de se défaire ! Extrait de « Comment faire un documentaire », « Rencontre avec Anne et son Pez Orchestra » : La carte mentale de mon documentaire en train de se faire (vignette ci-contre), à télécharger en pdf :
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commentaire
écrit le < 01'09'10 > par <
annick.rivoire w5p poptronics.fr
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Nicolas l’avait bien dit, que "Prison Valley" , coréalisé par le photographe Philippe Brault et le journaliste David Dufresne et Upian (pour Arte), était "le" webdoc dont on parlait. La preuve avec le tout nouveau prix qui vient de leur être remis à Visa pour l’image, le festival du photojournalisme de Perpignan (jusqu’au 12/09). C’est la deuxième année qu’un prix France 24-RFI du Webdocumentaire est remis dans le cadre de ce festival plutôt dédié au photoreportage de presse. Etaient également nominés : "Les Hommes greniers", de Michael Sztanke et Bertrand Meunier (pour France 5), "The Empty House", de Nicola Sessa, Angelo Miotto, Christian Elia, Gianlucca Cecere, Claudia Pozzoli (pour Peace reporter), "Les Yeux dans la banlieue", de Philippe Ramos et Bruno Lorvao (pour Libération.fr), "Un Facteur en campagne", de Vincent Bonnemazou avec Jean-Luc Luyssen, Baptiste Macaire (par et pour Gamma films), "Les Arbres du Kilimandjaro", de David Castello-Lopes, Luc Ihaddalène, Pierre Bance (pour Lemonde.fr), "Africascopie, l’Afrique dans la révolution numérique", d’Antonin Sabot, Jean Abbiateci, Bernard Monasterolo, Eric Dédier (pour Lemonde.fr) "Reuters : Times of crisis", d’Ahmad Jassim, (Reuters-Mediastorm), "Surviving the tsunami : stories of hope", d’Ahmad Jassim (coproduction Fondation Thomson Reuters, Croix rouge internationale, Croissant rouge et MediaStorm) Tous les détails et les liens sur
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