< 06'01'09 >
Télévision publique, année zéro

Donc la télévision publique sans publicité après 20h, ça a commencé lundi 5 janvier, et visiblement, selon Médiamétrie, ça a plutôt motivé les Français, qui ont été plus nombreux (3,1 millions de patates de canapé en plus), et sont venus plus tôt (pic d’audience à 20h26 contre 21h15 habituellement) inaugurer cette soirée sans pub (ou plutôt sans réclame, puisque les sponsors d’émissions continuent à diffuser leurs écrans interludes). Ceci dit, le bulletin météo n’y est pas totalement étranger…

Avant même que la loi qui décide de la suppression de la publicité (et de son calendrier) ne soit votée (elle est présentée à partir de demain mercredi au Sénat, en vue de son adoption, une formalité selon Gérard Larcher, le président du Sénat...), France Télévisions a donc basculé hier, malgré les protestations de l’opposition, des salariés du groupe et d’un bon paquet d’observateurs qui craignent le laminage de la télévision publique. Nicolas Sarkozy avait dégoupillé cette grenade sans concertation, il y a tout juste un an. En argumentant de la générosité de sa décision (la pub déformerait les contenus de qualité, poussant les producteurs audiovisuels publics à courir derrière l’audience), le président fait ainsi le plus beau des cadeaux à ses amis patrons de médias privés, TF1 et M6 en tête.

Sur son blog, Renaud Revel, journaliste médias à « l’Express » révèle la teneur du « scénario d’une télé sans pub selon le Bipe » (Bureau d’information et de prévision économique), où TF1 et M6 sont « seuls bénéficiaires à court terme » : « Entre 2009 et 2011, nous prévoyons une usure des revenus publicitaires des chaînes publiques (-15% en 2010 et -30% en 2011) », estime le Bipe, pour qui la « diminution progressive des revenus publicitaires de France Télévisions bénéficiera à 2 types de médias : les autres chaînes et Internet ».

Evidemment, les salariés de France 2 et France 3, en grève les 5 et 7 janvier, ne sautent pas de joie. Le Syndicat des producteurs indépendants, qui a lancé en novembre le site ilcasselatele.fr, vient d’ailleurs de poster un petit film sur le Net, intitulé « On vous aura prévenus » pour faire passer le message : « En interdisant la publicité sur France Télévisions sans garantir son financement et son indépendance, le pouvoir prive les écrans de films, de fictions, de magazines, de documentaires, de courts métrages, de journaux d’information libres. »

« On vous aura prévenus », par le Syndicat des producteurs indépendants :



Guillaume-en-Egypte a beau jeu de remercier notre président, même si, au premier soir de l’entrée en vigueur de cette réforme ô combien démocratique, ce n’est pas Julien Lepers et son « Questions pour un champion » qui l’emporte mais… TF1 (7,8 millions de téléspectateurs pour TF1, 5,8 pour France 2 et 3,3 pour « Questions pour un champion »). Bizarre... Nul doute que Nicolas Sarkozy se frotte les mains de cette opération : après la pub, le président s’apprêterait à supprimer le juge d’instruction, selon Lemonde.fr… « Le chef de l’Etat devrait en faire l’annonce lors de la rentrée solennelle de la Cour de cassation, mercredi 7 janvier », explique le journal, qui conclut : « C’est ce qui fait craindre un renforcement de la mainmise du pouvoir sur les enquêtes les plus sensibles, qui ne seraient plus confiées à un juge du siège indépendant, mais à un magistrat du parquet dépendant du ministère de la Justice. » Faut-il faire un dessin ? Après la télévision libre, la justice libre… A vos marques, prêts, tous le doigt sur la couture du pantalon...

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