City Sonic 2015, festival des arts sonores, Mons (Belgique), du 12 au 27/09.
L’une des mallettes sonores de la série « Sound of suitcases » de Wang Chung-Kun, 2015. © Sarah Taurinya
< 26'09'15 >
City Sonic, l’empire des sons
Mons, envoyée spéciale (texte et photos) Ça donne quoi alors, un City Sonic, festival des arts sonores, quand Mons, la ville belge qui accueille chaque année l’événement, est capitale européenne de la culture 2015 ? Entamé le 12 septembre, le grand raout sonore s’achève ce week-end avec OMFI, One Moment Free Improv (un moment d’improvisation libre, des Belges JJ Duerinckx aka Maurice Charles JJ et Matthieu Safatly), un parcours dans la ville autour des univers de huit performeurs. Et un Sonic Apero, place du Marché aux herbes, pour ajouter une note festive à cette treizième édition plus prolifique que jamais : 70 artistes répartis sur une vingtaine de lieux à travers la cité, en intérieur et extérieur. Plutôt qu’un résumé indigeste, on a choisi trois installations comme trois pans de la culture sonore actuelle. Il pleut sur Mons… Arsonic, nouvel équipement musical de Mons, a ouvert ses portes en avril 2015 dans une ancienne caserne de pompiers reconvertie en « maison de l’écoute », avec salle de concert, de diffusion et studios d’enregistrement. Au Passage des rumeurs, le collectif Void présente « One Drop », installation plastique et sonore.
Dans le hall blanc, six parapluies en cascade. Une à une les gouttes d’eau glissent sur eux. Chaque rebond, capté et amplifié par des micro-contacts, émet un bruit de tonnerre sourd qui contraste avec la légèreté visuelle. Leur succession compose une rythmique incertaine, inexorable et hypnotique. Les gouttes finissent par échouer sur une plaque de cuisson électrique qui les dématérialise aussitôt. « One Drop », collectif Void, 2013 : On est au cœur du propos du collectif : en anglais void signifie vide. Un vide qui laisse au spectateur le choix de compléter le mouvement par la pensée, qui prend alors part au cycle du changement d’état de la matière. Le duo, composé de l’Italien Mauro Vitturini et du Belge Arnaud Eeckhout, présente aussi « Automatic Soundscape #1 » à la gare de Mons, dont il capte l’environnement sonore, pour le re-traiter analogiquement en direct et le diffuser dans une sorte d’orgue qui modifie encore les sons en nappe fluctuant au gré du passage des voyageurs. La vie cachée des automates La Maison du design accueille une sélection du centre et festival d’arts numériques de Taipei, partenaire de City Sonic. Dans l’une des pièces, Wang Chung-Kun présente des petites mallettes en bois.
Elles s’ouvrent à l’approche du spectateur pour dévoiler leurs délicats mécanismes. Telles des automates, elles interprètent leurs micro-partitions ubuesques en boucle jusqu’à ce que l’on s’éloigne d’elles. Un médiator gratte une corde, un barillet est amplifié par une petite corne en mouvement, des coucous marteaux surgissent de tous les côtés… « Sound of suitcase », Wang Chung-Kun, en mouvement : On est dans l’atelier de Pinocchio, les mallettes semblent avoir une vie propre que seul notre intérêt dévoile. La finesse des réalisations témoigne du travail d’orfèvre de ce jeune artiste taïwanais qui s’est fait une spécialité des machines sonores autonomes. L’audace en partage À la Pop Up galerie sont présentés les « Portraits audacieux » de Damien Bourniquel. Grâce au logiciel libre Audacity (d’où le nom de l’œuvre), il élabore des équivalences entre les fichiers numériques image et son. En changeant leur extension (PDF ou JPEG en Wav et inversement), on peut écouter les images et regarder les sons. Démonstration avec le portrait de Maurice Charles JJ : A partir de ce dispositif, Damien Bourniquel établit un protocole qu’il propose à des artistes sonores : à partir de leur portrait sonorisé, ceux-ci composent deux plages de 2,30 mn, qui seront gravées sur les deux faces d’un 45 tours. Leur mise en image par le même procédé fait office de pochette glitchée. Cette image finale constitue aussi une forme de partition. L’erreur, la dégradation, l’altération des données et leur caractère aléatoire sont intégrés dans le processus créatif ; une philosophie de vie en somme…
Pour City Sonic, l’artiste a réalisé dix-huit portraits supplémentaires à ceux présentés au printemps aux Ekluz (après une résidence au Château éphémère). Sur son site, on perçoit le véritable travail éditorial qui s’est mis en place. Chaque réalisation présente l’artiste complice et éventuellement des notes sur ce travail commun. Sous ce prisme artistique, on découvre la richesse d’une scène sonore très diverse dont les univers cohabitent sans jamais se ressembler. City Sonic 2015, la compile Dans le format plus classique de la compilation, Transcultures, l’association à l’origine du festival, édite « City Sonic 2015, A sound art selection », vingt-six titres pour la plupart inédits d’artistes participant au festival dont Janek Schaefer, Martyn Bates, EZ3kiel, Jason Van Gulick, Fujui Wang, Charles Pennequin, Stéphane Croibien. La sélection donne envie de poursuivre la découverte. En écoute ci-dessous (et en vente 7€ en digital, 10€ le CD) :
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