Monsieur Tati, ceci n’est pas une pipe
Censure et bêtise ont toujours fait bon ménage. On connaît les censeurs qui prennent des vessies pour des lanternes, voici venus ceux qui prennent des pipes pour des moulins à vent. Jacques Tati a cassé la sienne il y a longtemps déjà (1982), mais la mesure qui le frappe post-mortem est bien dans l’esprit de ses films. La régie pub de la Ratp, Métrobus, a remplacé la pipe de Monsieur Hulot par des ailettes de moulin sur les affiches annonçant la roborative rétrospective que consacre la Cinémathèque à l’auteur de « Playtime » (on y revient). Décision prise pour se conformer à la loi Evin qui interdit toute publicité pour le tabac. Une mesure idiote qui n’en finit plus de faire des remous. Si la Cinémathèque s’amuse de cet « incident burlesque », la Société des réalisateurs de films (SRF) et le Syndicat de la critique de cinéma se sont fâchés tout rouge (« Cette censure sanitaire conduit à un révisionnisme insupportable touchant l’art et la culture »), la Ligue des droits de l’homme a carrément lancé une « pétition contre la censure de la pipe de Monsieur Hulot » et même la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, et le père de la loi, Claude Evin, ont dénoncé cette suppression « ridicule ». Les pouvoirs publics n’avaient pas été si large d’esprit quand la même mésaventure avait frappé la cigarette de Jean-Paul Sartre lors d’une exposition à la BNF il y a quelques années... Et de demander du coup des aménagements à cette loi de 1991 que Métrobus suit religieusement. La régie pub de la Ratp vient en effet d’interdire une autre affiche, celle de « Coco avant Chanel », au prétexte qu’Audrey Tautou y fume une cigarette, forcément. Mais qu’est-ce qui les gêne sur l’affiche, censurée elle aussi, du film « Anges & Démons », suite du nanar mondialisé « Da Vinci Code » ? Une mention en surtitre, « Que nous cache le Vatican ? », a donné des boutons à l’afficheur - qui prend décidément tous les risques. Plutôt que de jouer les Quichotte, Guillaume-en-Egypte, le chat-pigiste de poptronics, a trouvé la solution : mettre des moulins à vent partout. Sur Sarkozy, sur TF1 et, surtout, sur la flamme de la statue de la Liberté, toujours plus malmenée où que l’on regarde. < 1 >
commentaire
écrit le < 29'04'09 > par <
emmare JQw orange.fr
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