A l’occasion du festival international du court métrage de Clermont-Ferrand 2019, du 1er au 9 février, focus sur deux films canadiens parmi les 163 films en compétition, « Turbine », du Canadien Alex Boya et « Haus », de Joseph Amenta.
L’homme à la tête de « Turbine », film d’Alex Boya (capture écran). © DR
< 04'02'19 >
Clermont 2019, les courts du jour : « Turbine » et « Haus »
Clermont-Ferrand, envoyée spéciale Poptronics est un habitué du Festival international du court métrage de Clermont-Ferrand, qui se tient cette année du 1er au 9 février. J’y anime, aux côtés du réalisateur Claude Duty et de la fondatrice d’« Awotele » Claire Diao, les Expresso, les rencontres avec les réalisateurs du monde entier qui défilent chaque matin à la maison de la culture, QG du festival. Le marathon des interviews (10mn par réalisateur, de 9h30 à 13h30) a débuté dimanche 3 février, entamant pour de bon le cœur du festival auvergnat : sa compétition. Pour cette édition plus internationale que jamais (sur les 163 court-métrages en compétition, 78 le sont en sélection internationale, 54 en sélection française et 31 pour le Labo), on a choisi un premier focus sur l’un des pays à l’honneur cette année, le Canada, qui a droit à une programmation particulière, hors compétition. Dérogeant dès le premier jour à la règle du choix (cornélien) d’un film parmi les centaines qui sont projetés au public, voici dont deux courts de la compétition internationale qui n’ont rien à voir l’un avec l’autre, sauf la nationalité de leur réalisateur. Animation steampunk « Turbine », d’Alex Boya, est un film d’animation assez inclassable et plutôt surréaliste, où un homme qui rentre de la Deuxième Guerre mondiale en revient transformé (jusque-là, tout est normal), son corps ayant fusionné avec son avion (c’est là que les choses déraillent, pour ainsi dire). Sa femme a bien du mal à reconnecter et devra user de stratagèmes machiniques pour retrouver leur complicité. Avec son esthétique steampunk qui mixerait Jean Dubuffet et Robert Crumb, le film est composé de quelque 4500 dessins, certains à l’eau forte (passés dans un bain d’acide pour leur donner un effet gravure). Alex Boya, passé par l’illustration médicale, dit s’être inspiré d’une imagerie de « gravures scientifiques du XVIIIe siècle ». Une façon de présenter une forme d’« observation objective » de l’effet du progrès et de notre attraction « cyclique » pour les machines : « Le patrimoine de ce genre d’image, leur neutralité, donnent une subjectivité encore plus agressive. » C’est aussi une fable plutôt acide sur le transhumanisme et les dangers du « progrès ». Fusionner avec les machines, nous raconte « Turbine », ce n’est pas si simple pour ensuite vivre au jour le jour des relations triviales : ce faux mode d’emploi pour embrasser un ventilo dit en substance que l’être humain a ce petit supplément d’âme pour lui... « Turbine », d’Alex Boya (6mn30, 2018), en trois extraits : Makai et Trevon au Kiki Ball « Haus » de Joseph Amenta est un court métrage solaire sur la scène queer et trans des Kiki Ball à Toronto. Cette communauté LGBT noir et latino apparue dans les années 1980 aux Etats-Unis s’affronte en compétitions entre maisons (house en anglais, Haus en allemand, le titre du film). Danse (dont le dérivé le plus connu est le voguing), maquillage et travestissement participent de cette sous-culture qui protège ses membres comme à la maison… Joseph Amenta, casquette à l’envers et chemise à carreaux, a tout du bûcheron canadien à Clermont, n’était son maquillage paillettes. Le réalisateur (blanc) explique comment il a approché de longue date la communauté noir et latino Ball de Toronto, plutôt rétive à la visibilité grand public. Le film suit Makai et Trevon, deux jeunes Noirs qu’interprètent Mark-Ché Devonish et James Bailey. Ils ne sont pas acteurs (et jouent formidablement) : leur rencontre et l’histoire de leur amitié a fait changer son scénario initial au réalisateur. Makai est un peu fâché avec sa famille qui accepte difficilement son choix de vie, mais plutôt que de se prendre la tête, il pense au prochain bal, à draguer et s’amuser.
Un film résolument post-genre ? « Oui, c’est tout à fait ça, dit Joseph Amanta. Je voulais absolument dépasser le schéma d’une communauté blessée ou larmoyante, et faire ressortir leur joie de vivre. » Musique, danse, et fantaisie… « Haus » infuse une esthétique clip pour appuyer encore sur le monde fantastique dans lequel Makai et Trevon sont immergés. Avec justesse et une petite touche glam qui sied au (post-)genre. « Haus », Joseph Amenta (14mn37, 2018), bande annonce :
Jouons un peu à déjouer le genre dans le jeu vidéo
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