14e Festival de films gays & lesbiens de Paris, jusqu’au 11/11 au Rex, 1 bd Poissonnière, Paris 2e, au Latina, 20 rue du Temple, Paris 4e, et au Beverley, 14 rue de la Ville-Neuve, Paris 2e.
"Female & Queer Words & Beats #1" de Katharina Ellerbrock au Latina jeudi 6/11. © DR
< 05'11'08 >
(Con)fusion des genres au Festival de films gays et lesbiens

Comment rester pionnier dans la représentation de l’homosexualité quand celle-ci déborde largement sur les fictions mainstream (télé y compris), comme si tout film devait comporter son quota gay ? Le quatorzième Festival de films gays et lesbiens de Paris (FFGLP, de son petit nom), qui a débuté hier soir, peut-il conserver son statut défricheur alors que se multiplient les manifestations radicalisant le sujet, du Paris Porn Film Festival, à « IdentiT », le festival de films trans, en passant par le doyen Cineffable (20 ans au compteur), lesbien et féministe ?

Pour se sortir de ce double traquenard, le FFGLP a fait le choix de casser les chapelles et d’élargir sa ligne. D’abord en regardant au-delà de son nombril, grâce au film italo-marocain au titre espagnol, « Corazones de mujer », de Davide Sordella et Pablo Benedetti, en ouverture, préambule au cycle Islam et homosexualité. Un road-movie (très) poussif, en dépit d’un sujet passionnant : la relation entre une jeune marocaine qui veut se faire opérer pour retrouver sa virginité et un homme tiraillé entre sa paternité et ses désirs. Pour aller plus loin, on jettera donc un œil attentif au documentaire de Parvez Sharma, « Djihad, au nom de l’amour », témoignages d’hommes et de femmes qui ne veulent ni renier leur foi ni refuser leurs désirs. Et pour faire savoir que le FFGLP joue l’ouverture, il l’écrit en sous-titre de la manifestation : « films de tous les genres ». Et enfonce le clou avec l’affiche et le teaser du festival, des plans serrés sur des visages qui jouent de la confusion, signés Pascal Lièvre, l’artiste dont poptronics vous a déjà dit du bien et qui bénéficie d’une séance carte blanche.

A repérer, donc, au sein de la sélection, les séances du Beverley, que les plus sanguins de nos lecteurs ne manqueront pas de rallier. Ce petit cinéma du 2e arrondissement est réservé aux séances clairement cul, et pas la praline : un film porno 100% filles, un docu sur la communauté lesbienne de San Francisco ou un docu porno sur un couple transgenre...

Ambiance plus arty avec la dernière production de Bruce LaBruce, « Otto ; Or, Up With The Dead People », sélectionné à la Berlinale 2008. L’histoire d’un jeune zombie gay aux abois rencontrant une cinéaste lesbienne underground, à Berlin, dans un mélange de pornographie et de fantastique. Avec cette métaphore du sida affichée, l’ancien cinéaste gonzo, dont aucun film n’est sorti en salles en France depuis « Hustler White » en 1997, et pour qui le cul est nécessairement politique, affine son style et gagne en épaisseur.

« Otto ; Or, Up With The Dead People », de Bruce LaBruce, la bande-annonce :



Les filles énervées ont leur programme « Rock & Bad Girrrlz ». Avec notamment « Female & Queer Words & Beats #1 », de la réalisatrice allemande Katharina Ellerbrock, un documentaire de 2004 qui a pas mal tourné en festivals mais est resté inédit à Paris. Le film part sur les traces du Tigre, Rhythm King and Her Friends, Peaches et autres survoltées, qui à la suite des riot grrrls des 90’s, Bratmobile ou Bikini Kill, ont réinventé une révolution musicale à base, non pas de popopopop, mais de punk, d’électro lo-fi et de texte enragé/engagé, soit exactement « Female » + « Queer Words » + « Beats ». Depuis il y a eu un « Female & Queer Words & Beats #2 » (2006). Dans combien d’années à Paris ?

Totalement raccord avec l’actu au lendemain des élections américaines, la traditionnelle Nuit gay mitonnée par Canal+, ce soir, fera le point sur l’homosexualité outre-Atlantique, avec entre autres « Fantasmerica », un voyage au pays des fantasmes érotico-pornos gay américains. Plus contemplatifs, les voyages proposés par Vincent Dieutre avec sa série de journaux intimes filmés et sa relecture inédite d’un dialogue issu de « La maman et la putain ».

Enfin, entre deux fiestas, on pourra découvrir une sélection de courts (côté garçons/côté filles, le mélange des genres a ses limites), dont le nouveau film de Yann Gonzales, « Je vous hais petites filles », « Donne-moi la main », premier long métrage du jusque-là auteur de courts Pascal-Alex Vincent (sous-Larry Clarke ou vrai cinéaste de l’adolescence ? à vérifier sur pièces), ou encore un documentaire consacré à Keith Haring.

benoît hické et julie girard 

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