A l’occasion du Midem (Marché international du disque et de l’édition musicale), du 27 au 31/01 à Cannes, focus sur les effets d’annonces, les polémiques et plus globalement sur l’état de l’industrie musicale.
Effets d’annonces, batailles de chiffres, solutions en tous genres, opérations séductions... A Cannes, chacun voit Midem à sa porte. © DR
< 30'01'08 >
Le Midem veut croire à la sortie de crise

Ça va mieux en le disant : « 2008 devrait être l’année de basculement vers des usages légaux. » Hervé Rony, directeur général du Snep (Syndicat national de l’édition phonographique), a fait dans la pensée positive lors de la conférence de presse du syndicat du disque au Midem (Marché international du disque et de l’édition musicale), le grand raout du secteur qui s’achève demain à Cannes. Car les chiffres sont décidément têtus : le marché de la musique a encore perdu 17% l’an dernier par rapport à 2006, année où le secteur semblait déjà toucher le fond. Après plus d’une décennie de croissance à deux chiffres, les ventes de disques sont en chute libre depuis cinq ans : le marché « physique » des CD rapportait 1,3 milliard d’euros en 2002, la moitié seulement l’an dernier (662 millions, - 19,2% par rapport à 2006).

Olivennes contre Attali

Alors, comme d’habitude, on glose sur ces méchants pirates qui viennent mettre la zone dans un secteur économique sinistré, alors que la dernière étude GfK pour le magazine « SVM » montre que le téléchargement illégal aurait réduit de moitié en 2007.... Lors de sa conférence de presse d’ouverture, la ministre de la Culture, Christine Albanel, s’est faite une fois de plus la porte-voix de l’industrie. Sans surprise (et sans nuances), elle s’en tient aux propositions du rapport Olivennes (la fameuse « riposte graduée », lire le dossier de « PCInpact ») et annonce qu’elle planchera dès février sur une loi inspirée des propositions du patron de la Fnac, qui sera présentée à l’Assemblée nationale au printemps. Et ce, même si la Cour de justice européenne vient de confirmer que protéger les droits d’auteurs n’autorisait pas toutes les atteintes à la vie privée des internautes.

La ministre en a profité pour tacler le rapport Attali, qui remettait en selle la licence globale : « Cette proposition n’a fait l’objet d’aucune concertation préalable avec mon ministère ni, que je sache, avec les professionnels. » Ah oui, mais Sarkozy a bien dit qu’il appliquerait la totalité des préconisations de ce rapport... et donc, toute ressemblance avec l’affaire de la suppression de la pub à la télévision publique… Bref, Albanel fait comme elle peut pour exister : « Je proposerai au président de la République de ne pas retenir cette proposition, dont la simplicité a pu séduire dans un contexte où l’offre légale était déficiente, mais qui apparaît désormais en décalage total avec le dynamisme dont font preuve les acteurs économiques. » A bon entendeur…

Le numérique, porte de sortie à tout prix

La surenchère numérique bat son plein, même si ce ne sont pas les 50,8 millions d’euros de ventes sur Internet et téléphones mobiles, en forte augmentation (9 millions d’euros en 2004), qui viendront endiguer la chute (d’autant qu’elles augmentent moins vite en France qu’ailleurs). Un chiffre pour mesurer l’étendue du problème : en 2007, seuls 2,4% des albums vendus ont été téléchargés (pour 2% en 2006). Le sauve-qui-peut est donc plus que jamais au programme des majors. Un opérateur comme SFR Music squatte désormais près de 30% du marché des singles. Sponsorisé par Qtrax, censément le premier site de peer-to-peer légal, ce 42e Midem a regardé autrement la flopée de sites de streaming qui ont explosé l’an dernier (Deezer en tête). Après les actions en justice, les maisons de disques discutent avec ces plate-formes sur lesquelles les internautes créent et écoutent leurs propres playlistes. Sans la moindre trace de fichier MP3 sur leur disque dur (impossible alors d’appliquer la fameuse « riposte graduée »…). Une stratégie hautement hasardeuse : comme le souligne crûment l’excellent site spécialisé Ratiatum.com, les majors « signent des accords de distribution avec des services qui ne semblent avoir aucun modèle économique viable fondé sur la publicité ».

Heureusement, le Snep a trouvé la solution. Dans un document de 70 pages, publié à l’occasion du Midem, il propose, entre autres mesures croquignolettes, « l’extension de la durée des droits des artistes et des producteurs à 95 ans » ! Les premiers enregistrements de Dalida, Hallyday, Barbara ou Gainsbourg tombent dans le domaine public dans les trois ans à venir, il ne faut pas lâcher cette manne. Qui a dit combat d’arrière-garde ?

matthieu recarte 

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