(pop’live) Entre la pluie qui glace et la Marine qui fait froid dans le dos, avril se finit difficile. Sortir pour oublier cet entre-deux-tours aux relents pétainistes n’est pas la plus mauvaise idée. Sélection express pour tenir jusqu’au 6 mai.

Etrange effet du calendrier : on n’a jamais eu autant envie de filer s’installer à Portland. Plaque tournante indé américaine depuis vingt ans (cinéma, musique, BD…), pionnière écolo et indéfectible défenseure du free speech, la cité de l’Oregon est à l’honneur au Lieu Unique de Nantes, aux centres Pompidou de Paris et Metz et à la Gaîté lyrique. Associés derrière le mot d’ordre « Keep Portland Weird », ils proposent un instantané de la scène de cette ville d’un demi-million d’habitants qui ne ressemble pas à son pays : résolument verte (l’autoroute de centre-ville façon Lyon a été fermée pour devenir une promenade arborée, entre autres initiatives incongrues au pays du tout-bagnole) et effectivement étonnante -on y défile nu à vélo une fois par an. Pourquoi ? Comme ça, pour le plaisir ! Bref Portland est du genre à faire rêver, englués que nous sommes dans des débats nauséabonds : démocrate jusqu’au bout des ongles, la plus grande ville US dirigée par un gay a vu naître des têtes de pioches comme Matt Groening, Chuck « Fight Club » Palahniuk ou Courtney Love (la légende assure que c’est même dans un club de la ville qu’elle a rencontré Kurt Cobain) et ne cesse d’attirer les électrons libres (Gus Van Sant, le reporter-dessinateur Joe Sacco ou notre grande copine Scout Niblett).

Au programme de ce « Keep Portland Weird », des conférences, des projections (à voir notamment les concerts captés par l’émission « Experimental Half-Hour ») et une sélection de concerts relativement sage (on aurait aimé y entendre des groupes comme Breakfast Mountain) et à forte teneur en guitares. Normal, la scène de Portland s’est développée sur un terreau punk, cité des garage Kingsmen (qui popularisèrent l’immarcescible « Louie Louie » dans les années 60) ou des essentiels Wipers, le groupe punk qui a ouvert la voie au grunge, dont la voisine Seattle deviendra l’épicentre. On vous recommande d’aller jeter une oreille à AU, le duo math-rock de Luke Wyland et Dana Valatka (batteur de Jackie O’Motherfucker, autre fleuron local dont Poptronics vous parle depuis longtemps), et aux lancés Nurses, un trio qui fait le grand écart entre le Animal Collective psychédélique et Arcade Fire. Déjà deux albums, inégaux mais prometteurs (27/04, Gaîté lyrique).

Nurses - « Fever Dreams » (2011), real. Nurses :

Au Centre Pompidou pendant ce temps, l’ambiance sera plus calme avec le folk de Holcombe Waller, une sélection de vidéos de l’artiste Vanessa Renwick, et le Cascadia Ensemble, formation créée spécialement pour l’occasion, réunissant notamment Tara Jane O’Neil, magnifique chanteuse folk trop méconnue, et notre chouchou Mélanie Valéra alias Tender Forever, Française exilée sous les cieux plus cléments de l’Oregon.

Brainstorm saisi par Terroreyes.tv à Sacramento, réal. Sean Stout (2011) :

La clôture dimanche (29/04) sera plus festive, avec quelques hurluberlus comme on les aime : le camarade Yacht, désormais duo, que les lecteurs de Poptronics connaissent bien, la curiosité de la programmation Brainstorm avec son rock libre infusé de Deerhoof, et le projet solo de Brian Mumford, Dragging an Ox through Water, à base d’instruments maison et de folk électronique.

Dragging an Ox through Water - « Snowball Treatment », réal. M. Blash (2008) :

Of Montreal est peut-être moins pertinent sur ses derniers albums, mais demeure un histrion scénique (27/04, Trianon). Si les arrivées sur scène à cheval sont à ranger au rayon des souvenirs, on peut faire confiance à Kevin Barnes et sa bande pour leur science des costumes et du show. A noter qu’en première partie, on retrouvera NZCA/Lines, annoncé comme le nouveau Metronomy. Rien de moins. Gage de sérieux, c’est le label Loaf qui a repéré Michael Lovett et sa voix haut perchée. Mixé par Ash Workman, l’homme derrière « The Look » et « The Bay » de Metronomy, le premier album de NZCA/Lines sorti en février suit la voie de ses aînés et recèle quelques jolies bluettes de synth-pop veloutée sous influence croisée Hot Chip/Royksopp, comme ce « Compass Point », single 2011 dont on ne se lasse pas.

NAZCA/Lines - « Compass Point », réal. James Houston (2011) :

La soirée qui fait du bien revient début mai. Baptisée « Un autre monde », cette quatrième Nuit Ouf (04/05, 104) sera comme d’hab éclectique à souhait. Outre le retour des historiques du krautrock Amon Düül II (dont on n’est pas très client ici), on retrouvera Zombie Zombie et la chorale pop bordelaise Crane Angels ou la doucereuse chanteuse russe Lena Kaufman, Rémy Kolpa Kopoul et DJ Oof (à l’origine de ces soirées) se chargeant de lier la sauce dancefloor mondialisée.

Signalons aux amateurs de chanson française non formatée deux soirées au Cirque électrique programmées par Madame Macario. En retour de manif le 01/05, on y retrouvera entre autres Seb Martel, avec la danseuse AnnEmmanuelle Deroo pour leur projet « You will be my tribe » et avec ses Ondas Marteles, et Beau Catcheur (Fred Poulet et la contrebassiste des Marteles) ; le 05/05, à la veille de la journée de tous les dangers, le groupe qui monte Fantazio, Charlie O, Monsieur le directeur et L’Œillère. Autre moyen d’en finir en beauté avec Achille Talonnette, céder au son de Kill The DJ (05/05, Point éphémère) avec un plateau parfait : Ivan Smagghe, Chloé et Rebolledo.

Poptronics en a déjà parlé, vous pouvez y aller :
27/04 : Cosmo Vitelli, Bot’ox, Bobmo (I’m A Cliché Party) à la Java.
30/04 : Etienne de Crécy (live) au Social Club.
03/05 : Micachu & The Shapes et Ghostpoet au Trabendo.

Autres concerts et soirées :
27/04 : soirée Carnaval Republic à la Bellevilloise.
28/04 : Major Lazer au Bataclan (Diplo en DJ-set au Showcase à 23h30).
28/04 : Lindstrøm (live) au Social Club.
28/04 : Jennifer Cardini et Sascha Funke (soirée Correspondant) au Rex.
02/05 : Russian Circles au Point éphémère.
03/05 : La Chatte à la Mécanique ondulatoire.
03/05 : Jean-François Pauvros aux Instants chavirés.
04/05 : Fenster à l’Espace B.
04/05 : Kitchenmen à la Mécanique ondulatoire.
04/05 : Chelsea Wolfe et Odonis Odonis au Point éphémère.

matthieu recarte